Sous-genres underground et uniformes...

Ici on cause, on débat, on discute, on s'engueule, on recherche des trucs, en lien plus ou moins direct avec le punk DIY / Punx with brainz !
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Noir Vomi
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Sous-genres underground et uniformes...

Message par Noir Vomi » 02 nov. 2006 1:37

EDIT : Tranfert ici d'une discussion partie d'un sujet n'ayant rien à voir.
noé a écrit : Et le BBB c'eqt quand même trés faf, j'trouverais ça bizarre que des antifas leur reproche de ne pas l'etre assez...
Qu'est-ce qu'ils aiment pas dans la bière-baise-baston les neusks rouges ? J'avais l'impression que c'était la même chose, ptet dit avec des mots différents. Je reconnais qu'ils/elles parlent pas trop de cul ceci dit et qu'on commence à taper dans les clichés mais pour ce que j'en vois y'a toujours une part de vérité. "Un skin restera toujours..."... "Quoi, répète ça pédé ?" :)
(Même si j'exclus pas le concept du skin pacifiste en soi, d'ailleurs y'a même un ou deux skins sxe, et ptet même trois, faudrait compter).

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Chéri-Bibi
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Message par Chéri-Bibi » 02 nov. 2006 1:44

Il y a une différence certaine entre "pacifiste" et "pacifique" non?
Le reste... il y a longtemps que je me suis aperçu qu'entre l'étiquette que certains se donnent et la vérité des idées mises en pratique, il y a un putain de fossé.

Une chose encore: j'ai remarqué que souvent les préjugés les plus rabachés sur les skins se présentent ici-même. Soit. De part le comportement de beaucoups, ils peuvent être fondés... Mais quoi, les skins c'est comme les punks, les zouls, je ne sais quoi, il y en a autant de différents et "y'en a des biiieeeennn". :lol:

Bref, perso je tape (presque) que sur la gueule des bobos, j'ai l'droit d'vivre docteur?
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Message par noé » 02 nov. 2006 1:47

Ouai mais toi t'écoutes du raggae. ;)
Et on en a comme des melons, mec!
http://scalp-69.blogspot.com

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Message par Noir Vomi » 02 nov. 2006 2:10

Chéri-Bibi a écrit :Une chose encore: j'ai remarqué que souvent les préjugés les plus rabachés sur les skins se présentent ici-même. Soit. De part le comportement de beaucoups, ils peuvent être fondés... Mais quoi, les skins c'est comme les punks, les zouls, je ne sais quoi, il y en a autant de différents et "y'en a des biiieeeennn". :lol:

Bref, perso je tape (presque) que sur la gueule des bobos, j'ai l'droit d'vivre docteur?
Je savais bien que t'allais pas laisser passer ça. :)
Chéri-Bibi, fallait pas non plus prendre ça forcément au premier degré. Mais pour répondre quand même un minimum, puisque je disais pas ça de façon totalement gratuite non plus.
Comme tu dis, "y'en a des biens", comme dans le punk et le reste. Je dis pas le contraire, puisque lorsque j'ai un problème, c'est avec telle culture et telles idées, et pas spécialement avec l'individu-e qui peut baigner dans untel milieu ou avoir certaines idées. Et dans la "culture skin", et tu pourras sûrement me reprendre puisque je doute pas une seconde que t'en connais bien plus long sur le sujet que moi, en tordant ainsi le cou à certaines idées reçues, y'a quand même pas mal de trucs qui me dérangent, encore une fois sans jamais parler des individu-e-s. La culture skin pour moi ça reste comme l'armée, c'est le triomphe de l'uniforme. Tu me diras c'est comme ailleurs, le punk ou n'importe. Et justement bof, y'a une telle rigidité des codes (ne serait-ce que vestimentaires) que j'arrive pas à trouver tout de suite de comparaisons avec d'autres trucs. Parce que si jamais tu veux parler du mouvement skin, faudra bien un moment ou un autre balancer l'ethymologie du mot : le skin a le crâne rasé. Je trouve que d'emblée, c'est cimenter le mouvement dans le culte de l'apparence, la tradition, le formalisme et j'en passe. Se raser le crâne pour être skin, ou être skin et donc se raser le crâne, c'est un acte de soumission par excellence, même si c'est supposé être ptet contre-culturel quelque part, mais c'est jamais que désavouer la culture plus majoritaire pour en adopter une autre, avec ses règles aussi strictes voire plus. Je développe pour le crâne mais j'aurais pu souligner autre chose à des niveaux complètement différents et qui craignent tout autant, comme la virilité exacerbée et tout ça. Mais ptet qu'on peut être skin et être reconnu comme tel et avoir les cheveux longs, j'en sais rien, tu vas me le dire, ou sinon c'est vraiment un moule, et si quelque chose en dépasse, l'étiquette colle pas.

Sinon pour la tof, je viens de voir que le sujet était aussi abordé sur leur forum.
http://www.neophyte-net.com/forum2/view ... 98&start=0" onclick="window.open(this.href);return false;
Ensuite restent à voir comment naissent ces rumeurs de paris et autres.

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Message par Chéri-Bibi » 02 nov. 2006 2:34

Noir Vomi a écrit :La culture skin pour moi ça reste comme l'armée, c'est le triomphe de l'uniforme. Tu me diras c'est comme ailleurs, le punk ou n'importe. Et justement bof, y'a une telle rigidité des codes (ne serait-ce que vestimentaires) que j'arrive pas à trouver tout de suite de comparaisons avec d'autres trucs. Parce que si jamais tu veux parler du mouvement skin, faudra bien un moment ou un autre balancer l'ethymologie du mot : le skin a le crâne rasé. Je trouve que d'emblée, c'est cimenter le mouvement dans le culte de l'apparence, la tradition, le formalisme et j'en passe. Se raser le crâne pour être skin, ou être skin et donc se raser le crâne, c'est un acte de soumission par excellence, même si c'est supposé être ptet contre-culturel quelque part, mais c'est jamais que désavouer la culture plus majoritaire pour en adopter une autre, avec ses règles aussi strictes voire plus. Je développe pour le crâne mais j'aurais pu souligner autre chose à des niveaux complètement différents et qui craignent tout autant, comme la virilité exacerbée et tout ça. Mais ptet qu'on peut être skin et être reconnu comme tel et avoir les cheveux longs, j'en sais rien, tu vas me le dire, ou sinon c'est vraiment un moule, et si quelque chose en dépasse, l'étiquette colle pas.
Bon d'là, j'ai déjà entendu ça tellement d'fois en 15 piges à baigner là d'dans que j'pourrais autant t'envoyer chier en deux lignes que te répondre posément en 30 pages. On va tenter le compromis.

Par rapport à l'uniforme etc: le trip skin c'est un trip de bande, t'es difficilement skin tout seul dans ton coin. Une copine a dailleurs abandonné le trip en m'expliquant que dans son nouveau bled y'avait aucun skins donc basta, et pourtant elle l'était jusqu'au bout des cheveux, et elle l'est toujours dans la tête quoiqu'elle s'en défende. Je le sais je la connais depuis 10 piges. Bref, il serait hypocrite de rejeter le trip uniforme, ce bien que la "panoplie" skinhead offre un large panel de choix, du costard 3 boutons au treillis + marcel. Le tout étant de choisir ce que tu met à quel moment (le treillis en soirée ça le fait pas trop, pas plus que le costard quand y'a d'la baston dans l'air). Mais avant tout, tu met les fringues que t'aimes non? Donc si le look skin te plaît, et si en plus ton attitude personnelle justifie que tu le porte et revendique implicitement l'état d'esprit qui va avec (en gros si tu l'assumes), fonce!
Pour ce qui est de l'armée, j'ai fait mon sévice national et franchement, mon crâne zéra passait très moyen là-bas...
D'ailleurs être skin c'est pas forcement avoir le crâne zéra, c'est avoir des cheveux courts! Les premiers skins furent appelés ainsi car oin voyait la peau de leur crâne (skin head) à travers leurs cheveux; regarde des photos de skins 69, t'en trouveras bien peu avec le crâne zéra. Quant à l'acte de soumission, au contraire: aujourd'hui le crâne zéra est largement répandu mais je peux te dire qu'il y a ne serais-ce qu'une 12aine d'année c'était encore mal vu. En France le tondu fait référence au bagnard de Cayenne (Chéri-Bibi!), et en UK les mômes sortaient de centres de correction avec la boule à zed...
Il faudrait quand même arrêter de voir les choses que "de l'intérieur". Qui a un uniforme? Qui fait acte de soumission? Les skins ou les types qui vont tous les jours bosser en costard cravate avec une coupe réglementaire et les pattes coupées au-dessus des oreilles?
Développer une autre culture, tout à fait, et c'est revendiqué! Le tout est de savoir si elle te correspond et si tu l'assume 24/24!
Quant au trip viriliste, bof, je dirais plutôt le trip "fier & smart" car il y a des skinheads hommes et femmes, et l'élégance de la rue, ma foi, c'est nous qui la représentont le mieux, du moins le plus fièrement.
La preuve, on est quasiment la seule culture de rue à cirer ses pompes!!!
:lol:
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Message par Noir Vomi » 02 nov. 2006 3:26

Chéri-Bibi a écrit :
Bon d'là, j'ai déjà entendu ça tellement d'fois en 15 piges à baigner là d'dans que j'pourrais autant t'envoyer chier en deux lignes que te répondre posément en 30 pages. On va tenter le compromis.
Je cherchais justement pas à me faire "envoyer chier", ce qui m'aurait uniquement conforté dans mes idées, mais à avoir une autre vision. Ouais, j'allais te parler des différentes déclinaisons du "look", me doutant que t'allais y faire une allusion. En parlant d'acte de soumission, ça ne voulait pas dire que c'était la solution de facilité, mais j'ai pas exclu que ce soit se soumettre à la bande de potes, en respectant ses codes. Je parle bien de la bande et pas des potes, donc de ce qui les "fond", de ce qui fait d'une certaine façon partiellement disparaître l'individuE.
Mais en gros l'idée était de dire que se raser le crâne, ou avoir les cheveux courts puisque dans mon esprit je pensais pas non plus à un crâne complètement luisant (tu me tondrais vite fait bien fait si tu voyais ma chevelure, donc pour moi ça fait pas grande différence) c'est consentir à un rite. Ce qui me semble évident et donc incontournable puisque tu parles du côté collectif, "bande" du trip. Ensuite souligner ça ne me rend pas aveugle pour autant par rapport à l'aliénation qu'il y a dans d'autres cultures, y compris le trip métro/boulot/dodo/costard cravate ça va de soi. Mais ça, j'en parlerais plutôt à un jeune cadre dynamique libéral, qui se croit libre, mais pas ici. Mais au final c'est la même chose. Voir l'aliénation des autres qui vivent dans un monde complètement à part rend pas plus libre pour autant. Y'a même rien de plus facile. Voir sa propre aliénation, c'est déjà autre chose, ne serait-ce que comprendre qu'on peut aussi ne pas être si libre qu'on le pense.
Chacun-e se croit libre, et il/elle reste prisonnier-e des codes de son groupe, peu importe sa taille ou son nom. Je trouve pas que tu me démontres le contraire, tu les contestes pas, tu les reprends simplement. C'est pas un reproche, c'est un constat. Evidemment si t'aimes avoir des cheveux courts, des fringues de telle marque, etc, tu ne vas pas t'en priver. Mais derrière les différentes variantes, on tourne quand même vite en rond et y'a pas grande place pour la fantaisie. Pourquoi pas un Marcel avec je sais pas, des taches roses dessus, ou un neusk avec une casquette Boney M (hihi) qu'il porterait pas juste par provocation un soir parce qu'il est bourré, mais dans la vie de tous les jours parce que ça lui plaît cette casquette, pour une raison X ou Y ? C'est sûr, c'est pas "skin". Mais tu me dis que c'est pas la culture skin qui conditionne, mais qu'à la base c'est une question de goûts. Même si ces goûts vont vite être en total accord avec ceux tolérés dans tel groupe. Je caricature un peu quand même mais l'idée est là.
Si au départ c'est juste une question de goût avec pour dénominateur commun les cheveux courts, ça devrait être un peu plus bordélique, diversifié que ça. Mais à un moment ou un autre, même si tu t'en rends pas compte comme ça, y'a la "culture skin" qui intervient, qui emprisonne, le regard des autres de ta bande et tout ça qui se met en place, même si au départ c'était ptet pas présent. Je dis pas "tu" en te visant personnellement, c'est une façon de parler. C'est pas propre au mouvement skin : toute culture est aliénante, ou sinon faut changer la définition du mot "culture". Mais dans le mouvement skin, ça me semble donc plus prononcé que dans le trip anarchopunk par exemple, c'est plus cul serré, et tu me diras que quelque part c'est normal puisque l'anarchopunk accorde une plus grande place à l'autocritique et donc à la remise en cause de l'apparence, entre autres, et donc que c'est encore la culture qui veut ça, puisque c'est "l'esprit" anarchopunk, du moins idéalement. Mais ça au moins c'est une culture qui émancipe déjà plus, où les règles sont bien moins présentes d'un point de vue formel, etc, et surtout, et c'est ce qui me semble faire sa force, une culture qui accorde une grande place à l'autocritique, ce qui me semble la base quand on veut parler de liberté individuelle, à commencer par la sienne. Quand tu me parles de liberté, j'ai l'impression que tu me parles d'une toute autre liberté, une liberté formelle, naïve, qui connaît pas l'inconscient, le conditionnement, un concept juste bien pour des slogans en fait, être "plus libre que les autres", "fiers, jeunes et libres", ces conneries d'aveugles là.
Pour le trip viril, j'ai pas parlé d'un mouvement non-mixte et totalement macho, je suis au courant que certainEs sont même assez progressistes, ça voulait juste dire que le côté "mâle" était largement exacerbé chez les garçons. Enfin bref faudrait ouvrir un autre sujet sur la question, je vois plus le lien avec Neophyte.

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Message par Chéri-Bibi » 02 nov. 2006 12:07

Noir Vomi a écrit :Mais dans le mouvement skin, ça me semble donc plus prononcé que dans le trip anarchopunk par exemple, c'est plus cul serré, et tu me diras que quelque part c'est normal puisque l'anarchopunk accorde une plus grande place à l'autocritique et donc à la remise en cause de l'apparence, entre autres, et donc que c'est encore la culture qui veut ça, puisque c'est "l'esprit" anarchopunk, du moins idéalement. Mais ça au moins c'est une culture qui émancipe déjà plus, où les règles sont bien moins présentes d'un point de vue formel, etc, et surtout, et c'est ce qui me semble faire sa force, une culture qui accorde une grande place à l'autocritique, ce qui me semble la base quand on veut parler de liberté individuelle, à commencer par la sienne.
Fais-moi rigoler! :lol: Les anarcopunks sont tous habillés pareils: vétements noirs, casquette de base-ball noire avec un patch et/ou un pochoir dessus et quelques badges sur le côté, sweat noir à capuche avec un pochoir dessus ou une impression quelconque à l'effigie de (au choix) la cause animale/Crass/Oi Polloi/un groupe crust au nom illisible... ajoute à ça des baskets et/ou de vieilles Docs customisées au feutre, quelques quolifichets à pointe et/ou tribals, divers piercings et les cheveux courts avec un mullet et/ou des locks et/ou une crête volontairement non-entretenue. J'ai cité le baggy? C'est qu'un vieux jeans rapiécé avec des patches fait l'affaire.

Ceci étant rappelé, je vais pas te recopier tout un mémoire de socio tel qu'en avait fait une copine sur la bande de Belleville en 99, j'avais pas tout pigé même si j'avais trouvé ça instructif et marrant. Mais baste, une bande n'est qu'un regroupement d'individus autonomes ayant des activités propres (et moins propres, ça dépend) et se regroupant par affinités et amitiés, vaguant d'un plan à l'autre sans chefs autoproclamés et solidaires dans la mélée.
Voilà, that's it, et ça j'l'ai toujours kiffé, depuis tout petit en bas de ma cité (on s'appelait les "Subway Warriors", on taguait, on écoutait Run DMC et on tripait sur "Les guerriers de la nuit").
Après c'est évident qu'il y a différents stades, différentes époques aussi. C'est plus facile (et sûrement plus cher) de se procurer toute la "panoplie" à l'heure actuelle. Mais mes deux premiers Perry je les ai chopé aux puces à Londres et ça a été longtemps les seuls que j'avait (comme si j'avais les moyens et l'envie d'acheter un polo 300 balles!!!), bref, on s'habille comme on peut et j'ai jamais eu de sweat Lonsdale parce que j'vois pas pourquoi j'achèterais plus cher un sweat avec la marque dessus! Pis j'aime à mettre une chemise africaine avec mon costard 3 boutons, merde, je sais pas, ça s'explique pas après tout, tout ça, c'est une way of life, t'y crois, t'y crois pas, mais j'y ai cru, j'y crois encore, j'y ai cru, j'y crois plus fort!
Et j'en ai rien à foutre que t'ai les cheveux longs ou pas (du moment que tu te les lave), j'prèfèrerait qu'il n'y ai que peu de skins si la qualité et la sincérité pouvait primer sur la quantité.

Pour le reste, en v'là une tartine:

Situ & skin c’est bien, si tu l’es pas tant pis.
Un dispensable manifeste du skinhead situationniste


1 - Le skinhead situationniste est un(e) skinhead qui pratique la construction de situations, c’est-à-dire la construction concrète d’ambiances momentanées de la vie et leur transformation en une qualité passionnelle supérieure sur le principe d’une révolution permanente de la vie quotidienne à laquelle participent pleins d’autres principes évoqués ci-après, principes qui ne sont plutôt qu’une somme de constatations liées à l’étude du skinhead situationniste dans son milieu naturel. Tout skinhead peut être, s’il s’en rend compte en lisant ceci, un situationniste. Tout situationniste peut devenir skinhead pour les mêmes raisons mais pas du jour au lendemain car il faut pas abuser, Rome ne s’est pas construite en un jour même si tous les chemins y mènent. Dans les deux cas, une intense curiosité culturelle est de mise, curiosité qui se doit d’être portée par un sentiment d’osmose quasi orgasmique, effet que connaissent bien les skinheads situationnistes pour écouter du skinhead reggae. Précisons qu’un vrai skinhead situationniste authentique, peu importe comment il en est arrivé là, se reconnaîtra obligatoirement dans les grandes et petites lignes qui suivent. En fait, un vrai skinhead situationniste n’a que faire de ce texte puisqu’il ne lui énonce que des évidences. Un vrai skinhead situationniste se méfie des manifestes, synonyme de choses figées, et c’est pour cette raison que celui-ci est entièrement dispensable bien que nécessaire. Ce manifeste ne prescrit pas, il dissèque le skinhead situationniste en ses tréfonds inavouables mais ô combien pernicieux pour le spectacle.

2 - Le skinhead situationniste est avant tout une personne issue de la classe ouvrière, que ce soit par filiation ou par affiliation, qu’il ait un emploi ou pas, qu’il travaille ou pas, que ce travail soit d’ordre artistique, salarié, illégal ou pas. En ce sens, le skinhead situationniste est solidaire de toute tentative d’une partie de sa classe visant à créer une situation nouvelle, émancipatrice et révolutionnaire, et ce dans le monde entier. Aucun skinhead situationniste n’a jamais résisté à l’appel de la grève et ne connaît rien de tel pour s’occuper qu’une bonne occupation.

3 - Le skinhead situationniste rejette absolument tout isme -et donc par là toute définition d’un "situationnisme" ou d’un "skinheadisme"- c’est-à-dire la transformation révisionniste et réductrice de sa culture en isme stérile donc en doctrine. Il échappe ainsi au sort peu enviable de l’idéal communiste devenu invisible au profit d’un "communisme" bureaucratique et autoritaire qui n’était que la négation de lui-même. Les ismes ne sont que les instruments par lesquels la pensée dominante de l’époque concernée transforme le mouvement dialectique des idées en doctrines. L’exemple est encore plus flagrant avec la volonté de certains "penseurs" de définir "l’anarchisme" pour ainsi en réduire les possibilités à la seule sphère individualiste d’une compréhension occidentaliste étriquée. Le skinhead situationniste n’a pas l’intention de remplacer un système unique par un autre système unique. Il détruira les représentations faussées du réel ou sera détruit par elles.

4 - Le skinhead situationniste a des références mais pas de leader (pas même Joe Hawkins); il n’est pas marxiste car Marx lui-même ne l’était pas ; il n’est pas plus léniniste, trotskiste, guevariste, bouddhiste et encore moins castriste ou maoïste. Il n’élève pas de statues, de temples ou d’églises et ne met pas de cadavres dans des mausolées. Il laisse les morts aux vers, le ciel aux pigeons et aux astronautes. Bref, il n’idolâtre pas, ne prie pas, ne supplie pas, ne demande même pas mais prend ce qui lui revient de droit.

5 - Le skinhead situationniste reconnaît fondamentalement la division de la société en classes et se méfie ainsi des tentatives perfides de la classe antagoniste à la sienne (la classe possédante) pour récupérer sa rébellion incontrôlée. Le skinhead situationniste ne tient nullement à subir le sort des mods embourgeoisés de force, ou pire, des situationnistes ancestraux dont les écrits sont actuellement disséqués et revendiqués par un de ses pire ennemis qui se pavane avec dans les cocktails : le bobo ("bourgeois bohème"). Cette race puante de récupérateurs mondains est un bien pire ennemi pour le skinhead situationniste contemporain que son ancêtre, le baba. Outre le fait que le bobo se soit approprié un à un certains des repères de classe du skinhead (à savoir les Doc Martens et le crâne rasé), ce résidu de fausse couche publicitaire fait appel à tout l’attirail des mass médias pour "branchétiser" une vision du monde aseptisée là où le baba se contentait de se casser en Inde ou dans un trou paumé, laissant la rue à qui de droit.

6 - Le skinhead situationniste n’est pas dupe d’un culte rendu au "spirit of 69" (et encore moins à travers une quelconque " bible" fourre-tout) car, hormis le fait qu’il refuse tout immobilisme historique, il sait pertinemment que la mouvance skinhead, en tant que rébellion de la jeunesse face à l’ordre établi et en tant que positionnement de classe de ladite jeunesse, est bien antérieure à cette année-là. Néanmoins il s’y réfère intrinsèquement car "l’esprit de 69" exprime toute la dialectique de sa mouvance. En effet, le nombre 69, outre l’avantage d’être une position sexuellement paritaire, est l‘expression même de cette dialectique qui fonde la base des contradictions et inversions sémantiques de ladite mouvance. Notons qu’un des groupe phare du skinhead situationniste est et restera (malgré les renoncements fallacieux de son chanteur sur le tard) Sham 69 qui débarrassa le punk rock de ses oripeaux mondains pour le ramener à l’expression prolétaire donc populaire qu’il mérite, sans concession au spectacle ni épingle à nourrice infantilisante. Notons surtout que cette année 69 érotique fut bercé par certains des hymnes les plus enthousiasmants du skinhead reggae, dont le terrible "Liquidator" n’est pas un des moindre. C’est enfin en 69 que paru le dernier numéro de l’indispensable revue de l’Internationale Situationniste, ce qui n’est pas rien.

7 - Il ne fait aucun doute pour le skinhead situationniste que le skinhead reggae est révolutionnaire puisqu’il est le fruit d’une interconnexion entre les situations sociales et psychogéographiques de deux peuples pour une même classe et que le punk ne l’est pas moins puisqu’il procède d’une démarche hautement situationniste d’un retour aux sources rebelles et anticonformistes du rock’n’roll et, en s’alliant avec le reggae, a su renouveler les deux genres pour tirer la mouvance skinhead, la musique populaire (par et pour le peuple) et la conscience de classe hors de l’oubli où croyaient les avoir enterré leurs ennemis historiques. Par extension, la richesse de la musique skinhead –rythm’n’blues, ska, soul, rocksteady, early reggae, rub a dub, punk, oi !, etc.- fait de cette mouvance à la fois la plus diversifiée et la plus cohérente des cultures “rock’n’roll”. Le skinhead situationniste peut, selon ses goûts, ajouter à cette liste des genres moins généralement écoutés mais aussi propres à la culture populaire (hard-core, ragga, garage, rockabilly, psychobilly, musette, hip-hop, etc.) et sait obtenir ainsi un panel de toutes les musiques ayant exprimé un tant soit peu les aspirations libératrices de la classe ouvrière ces 100 dernières années. Évidemment, les musiques afro-américaines et jamaïcaines n’ont pas été des moindres et tout skinhead situationniste qui se respecte se plaît à en parcourir les tenants et les aboutissants, pratiquant par là une dérive musicale des plus réjouissantes. Car pouvoir passer des Skatalites aux 4Skins pour atterrir sur un morceau de Wilson Pickett en moins d’une poignée de minutes est la preuve de la symbiose dialectique du skinhead avec les musiques fondatrices des différentes étapes historiques de sa mouvance. A l’alternance des rythmes apparemment incompatibles s’oppose une homogénéité du sens véhiculé : Ôde à une vie intense, sans entrave; chronique d’un quotidien aliéné; dénonciation du spectacle et de la justice de classe,… Tout procède d’une rage de vivre similaire. Et qu’importe la connerie déviante d’un ou deux individus comme le premier chanteur des 4 Skins suscités face à la radicalité jouissive de morceaux tels "One law for them". Le skinhead situationniste véritable est autant conscient de la complexité des situations que de ce que celles-ci révèlent de l’état du monde. Et surtout, les paroles du R’n’B, du ska ou de la oi ! lui parlent de son quotidien directement vécu, même à 30 ans d’intervalles, l’adéquation entre les thèmes du passé et les situations du présent n’étant que le signe de la vérité historique du sens véhiculé.

8 - Le skinhead situationniste pratique la dérive autant que faire se peut. Il connaît par conséquent très bien la psychogéographie de la ville où il dérive régulièrement. Mieux, il connaît, via les réseaux, les fanzines et les disques, la psychogéographie skinhead de son pays et généralement celle des pays et continents avoisinants. Ainsi, tout à ses dérives, il saura éviter ou fréquenter tel ou tel quartier selon les rencontres (fâcheuses ou amicales) qu’il sait pouvoir y faire et selon le désir qu’il a de les faire.

9 - Le skinhead situationniste rejette la violence quand elle s’exerce à son encontre. Cependant, et cela fait partie de sa vision dialectique du monde, il peut l’appliquer pour exprimer un antagonisme de classe, notamment face aux défenseurs de l’ordre, qu’il s’agisse de nervis nazis, d’intellectuels bobos ou de policiers dans l’exercice de leur fonction.

10 - Si un aspect important du skinhead situationniste est sa capacité à cerner et utiliser le second degré, user et abuser de l'humour en gros, que ce soit comme fin en soit ou comme moyen de se sortir des situations difficiles dans lesquelles il se met par sa tendance à monopoliser plus que de raison la parole, en particulier après quelques verres, le skinhead situationniste rejette la provocation à laquelle il préfère la libre expression de ses idées en toutes circonstances. Notons que si cette libre expression peut être perçue par d’autres comme une provocation, elle n’est que l’expression sincère de son authenticité et de son humour plus ou moins raffiné. Tendre le bras ou arborer des symboles cultivant une certaine ambigüité politique sous couvert satirique ne l’intéresse pas, il rejette ce genre d’infantilisme qui ne sert que ses ennemis et détracteurs. Il n’aime guère les quiproquos et toute assimilation à ce qu’il n’est pas et ne sera jamais, à savoir un raciste et un abruti décérébré au service du Capital.

11 - Le skinhead situationniste ne confond pas sa gauche et sa droite. Il sait où sont ses intérêts de classe, non pas sur l’échiquier de la politique politicienne mais sur celle de la lutte de classe. Et il (re)connaît sa classe. Mais, toujours aussi méfiant face aux utilisations légères de mots en isme, il ne peut qu’être critique vis-à-vis de l’utilisation parfois abusive du terme "skinhead" par des structures et organisations souvent figées dans des schémas primaires et réducteurs de cette culture. En outre, il se méfie de ce que d’aucuns peuvent entendre en se déclarant "communistes" ou "anarchistes", appellations galvaudées par les querelles stériles de chapelles et de partis. Refusant toute instrumentalisation, le skinhead situationniste préfère bien souvent se retrouver dans des associations et rassemblements autonomes de précaires, de prolétaires et de chômeurs où l’action quotidienne et radicale face à la classe dirigeante prime sur toute volonté de prosélytisme et de grandes phrases en isme. Pour le skinhead situationniste, un badge de Prince Buster est plus révélateur qu’un A cerclé ou qu’un quelconque drapeau (ce bien que le rouge soit le plus beau). Mais malgré ses réticences, ou en raison de celles-ci, le skinhead situationniste ne se prive pas d’apporter sa critique et son aide aux individus dont le combat va, du moins partiellement ou occasionnellement, dans le même sens. Prenant les leçons du passé pour ce qu’elles sont, il accepte et encourage bien souvent une démarche unitaire, la lutte contre les ennemis de classe étant à ses yeux primordiale et le sectarisme une voie de garage pour intellectuels figés dans l’immobilisme le plus cadavérique. Or, le skinhead situationniste aime par-dessus tout le mouvement.

12 - Selon le principe établi voulant que deux intellectuels assis aillent moins loin qu’une brute qui marche, le skinhead situationniste a à coeur de mettre la théorie à l’épreuve de la pratique et méprise ceux, y compris au sein de sa classe, dont les prétentions théoriques dissimulent la peur de l’action, ou pire, la non-application au quotidien de leurs beaux principes. De fait, il se fait l’ennemi absolu de toute tentative de récupération politicienne de sa critique sociale. Le politicien qui fait son fonds de commerce de la soif de liberté de la classe ouvrière risque un retour de flamme décisif s’il croise un skinhead situationniste authentique. Pour autant, l’apoliticien est un ennemi aussi mortel car loin d’élever la conscience de classe du skinhead, il l’abaisse à un nihilisme aveugle et individualiste débouchant au mieux sur une intégration sociale factice et embourgeoisée au prix du renoncement à toute révolte, au pire sur une complaisance envers des attitudes provocatrices et fascisantes d’individus voyant dans le skinhead une recrue de choix pour de basses besognes au détriment de la classe ouvrière dans sa diversité ethnique et culturelle. Le fasciste est –à l’instar du capitaliste dont il est issu- l’ennemi historique du skinhead, celui qui a osé usurper son nom et son apparence au détriment de ses origines. Ce révisionnisme, alimenté par les mass média, est la pire plaie qu’ait à subir tout skinhead véritable. Le skinhead situationniste a comme tâche historique de rétablir la vérité à travers son opposition violente à toute présence fascisante et tout amalgame médiatique. Cette "réhabilitation" nécessaire, qui n’est pas une justification personnelle mais une remise au point culturelle et historique, passe majoritairement par l’utilisation des musiques skinheads et de leur contenu intellectuel comme armes contre la désinformation ambiante, quoique d’autres ustensiles contondants puissent être occasionnellement usité.

13 - Le skinhead situationniste rejette toute discrimination portant sur la couleur ou les mœurs sexuelles des individus. Sa mouvance n’émet aucune doctrine, donc aucun interdit d’ordre homophobe ou sexiste. Rien ne saurait dailleurs empêcher sans perte et fracas un(e) skinhead d’être gay, hétéro ou bi si ça lui chante. Pour autant, il n’apprécie guère l’appropriation de ses codes vestimentaires par une partie de la petite bourgeoisie homosexuelle en mal de sensations fortes. Cette animosité est évidemment d’ordre social et ne procède d’aucun racisme sexuel, elle ne découle donc pas d’une quelconque homophobie mais d’une réelle conscience ouvrière de son oppression par le spectacle se voulant omniprésent et ceux qui en sont à l’origine ou, pire, le perpétuent. Elle s’applique par voie de conséquence à toute canaille bourgeoise voulant se faire passer pour ce qu’elle ne saurait être.

14 - Le skinhead situationniste connaît les vertus régénératrices pour le corps et l’esprit d’une intense activité sexuelle pratiquée évidemment dans le respect du/de la/des partenaire(s) et hors des rapports sexuels marchandés. Connaissant ses classiques, il sait combien l’écoute du rude reggae a des vertus stimulantes pour l’imagination et la durée des échanges de plaisir. La danse et l’amour sont les activités physiques obligées (avec la marche à pied) de tout skinhead situationniste qui se respecte, même si d’autres arts, sports et exercices sont couramment pratiqués. Il y cherche moins la performance que la félicité et, en cela, considère sexe, soul et reggae comme éminemment révolutionnaires car constructions concrètes de situations jouissives. Sentir le rythme bercer chaque moment d’une vie intense est tout l’attrait d’une existence saine dans "l’esprit de 69 ".

15 - Le skinhead situationniste n’utilise les drogues qu’à des doses modérées –pour lui. Il trouve souvent dans la boisson de quoi annihiler les derniers restes de morale judéo-chrétienne ou autre qui pourraient réfréner les résurgences libératrices de son subconscient. Par ailleurs, il tâche d’acquérir une maîtrise des effets de l’alcool afin de ne pas faire ce qu’il pourrait regretter à jeun ni se sentir dépourvu au coin d’une rue. Le skinhead situationniste sait que si l’alcool peut éventuellement l’aider à combattre ses ennemis, il ne doit pas aider ses ennemis à l’abattre. Refusant de devenir "esclave" d’une quelconque drogue, il sait s’arrêter quand il n’y a plus rien à boire. Cette tendance le met généralement au ban de nombre de débits de boisson, ce qui peut devenir une preuve de la pérennité de ses expériences de dérive et de la solidité de sa connaissance en psychogéographie urbaine. Un skinhead situationniste peut aussi ne pas boire s’il pense que cela l’aliène plus qu’il ne le libère, mais ça reste particulièrement rare. Et même dans ce cas assez improbable, rejetant toute doctrine, il ne saurait faire de prosélytisme “straith-edge” contre ses compagnons buveurs, sauf si son état non-alcoolémique lui fait entrevoir des abus néfastes pour les individus en question. Si l’usage de drogues autres reste à son appréciation, remarquons que toutes drogues atténuant durablement les capacités physiques et mentales du skinhead situationniste sont généralement proscrites par lui-même. Connaissant l’histoire parfois tragique de sa mouvance, le skinhead situationniste ne tient guère à finir toxicomane, l’ivresse de la vie étant sa préférée.

16 - Le skinhead situationniste rejette tout élitisme, même et surtout s’il provient de ses propres rangs. Il laisse cette attitude réactionnaire aux mods passéistes (qui pratiquent par leur pseudo-survivance un effroyable contresens historique et sémantique) et aux skinheads "traditionalistes à l’arrêt". Faisant sienne la phrase du situationniste Asger Jorn, "Le passé culturel doit être réinvesti ou disparaître.", le skinhead situationniste considère la tradition comme étant en perpétuelle mutation, se nourrissant de ses interprétations successives. Pour autant, il s’insurge et combat ceux qui voudraient la brader (mass médias et fascistes) aussi bien que les chantres de l’immobilisme cités plus haut. Il ne veut guère offrir une vision figée d’un "âge d’or", préférant vivre au présent l’histoire riche, dialectique et complexe de sa culture. Il rejette donc l’appellation de "culte" à connotation religieuse, sectaire et doctrinale, tout comme le terme de "mouvement" auquel il préfère celui de "mouvance", plus vague donc plus proche de cette complexité historique. Il fustige ainsi tous les raccourcis visant à appauvrir ladite complexité au profit d’un manichéisme réducteur.

17 - Si le bonehead, faux skinhead mais vrai fasciste, est, à l’instar du capitaliste son père, l’ennemi juré du skinhead situationniste, les mass médias et leurs amalgames douteux comptent parmi les pires propagateurs de cette peste brune chez les jeunes agités attirés par le côté spectaculaire intrinsèque à toute (dés)information concernant les skinheads. Il convient donc de rejeter avec force toute tentative réductrice de définir la mouvance skinhead via des reportages ou études de tâcherons bourgeois ne sachant qu’étaler idées reçues et imageries fantasques sans laisser voir la richesse du métissage culturel qui maintient en vie cette mouvance depuis plus de 30 ans et lui donne ce rayonnement international. Ecrire soi-même sa propre histoire à travers ses propres réseaux de classe reste une nécessité absolue pour le skinhead situationniste qui sait qu’il n’y a pas de meilleur objectivité historique que la somme des subjectivités de ceux qui font l’Histoire et souvent des histoires.

18 - Si le skinhead situationniste peut aimer le football et participer aux tribulations des tribunes d’une équipe particulière, il sait également se parer contre tout chauvinisme qui l’éloignerait de sa vision internationaliste du monde et le verrait s’affronter contre ses frères de classe pour le plus grand plaisir de son ennemi, les mass médias. Pour autant, la mixité des tribunes peut le conduire à lutter contre les forces de l’ordre (supporters d’extrême droite et flics) aux côtés d’autres jeunes et donc changer la vision de ces derniers vis-à-vis de la mouvance skinhead, ce qui prouve que le hooliganisme n’est pas que la maladie infantile du skinhead situationniste mais également un élément épisodiquement important de cohésion sociale des cultures urbaines. Cependant, dans son refus des ismes et son amour de la rue comme lieu psychogéographique de ses dérives, le skinhead situationniste préfère la manifestation publique à l’enfermement dans un stade. Il y évite tout cortège trop dirigiste et se regroupe avec quelques boissons dans l’espoir de pouvoir approcher vers la fin de l’après-midi les matins du grand soir. A cet effet, il sait se faire discret et bouger par petits groupes organisés, se retrouvant grâce à ses codes vestimentaires, reconnaissables par lui et les siens même dans leur sobriété (de tenue) requise pour l’occasion. Il ne recherche pas d’emblée l’affrontement car le skinhead situationniste hait la provocation (policière), mais s’y pare et reste sur ses positions jusqu’à la limite de l’arrestation -qu’il sait la plupart du temps éviter grâce à ses connaissances psychogéographiques- afin de profiter de ce champ de liberté spontanée qu’offre l’émeute urbaine.

19 - Le skinhead situationniste est par nature pour la réappropriation des moyens de production et par extension pour la répartition des richesses. Se refusant absolument à dépouiller ses pairs du peu durement acquis, il n’a pas ce genre de scrupules en ce qui concerne les marchandises aux mains du commerce. S’il bannit le vol à l’intérieur d’une même classe, il pratique cette répartition au détriment des entreprises et commerces bourgeois autant que faire se peut. Il est évident que les produits de la culture populaire diffusés dans des échoppes tenues par des militants de cette même culture sont à l’abri de ses visées. En effet, la haute conscience de classe du skinhead situationniste et son désir ardent de conformer ses actes à sa pensée ne sauraient s’attaquer qu’à des sociétés pratiquant des prix prohibitifs sur des denrées de première nécessité (alcool, disques, livres, bouffe, fringues), en fait à toute société ne pratiquant pas la gratuité alors que le profit engendré ne profite qu’à des intérêts privés d’entreprises et de commerces capitalistes participant à une marchandisation du monde.

20 - Si dormir n’est pas son métier, le skinhead situationniste ne songe pas tout le temps au labeur. Il éprouve un certain mal à établir des plans de carrière ou à se préoccuper d’une éventuelle retraite, occupé qu’il est à vivre sans temps mort pour jouir sans entraves. Si la production de biens sociaux est une idée qui n’a rien pour lui déplaire, donner une partie de sa vie pour que quelques privilégiés aillent se bronzer à St Tropez ou pour maintenir sur pied cette société l’excite nettement moins. Comme beaucoup de ses compères, il se retrouve souvent dans des emplois précaires qui ne lui laissent pas toujours le loisir de (sur)vivre et s’épanouir hors des heures de labeur dans la tentative de pouvoir transformer ses véritables activités passionnées en vrai travail producteur de sens collectif et de bonheur dans sa pratique, transformation qui passe entre autres par l'abolition pure et (plus) simple (que l'on pense) du salariat au profit de l’autogestion des moyens de production. A ce titre, le skinhead situationniste sait avec la vigueur de l'évidence et une connaissance certaine des travaux manuels que la hiérarchie c'est comme les étagères, plus c'est haut moins ça sert. Il sait aussi que le sabotage est un des principaux outils de l’exploité en colère et qu’un petit grain de sable peut enrayer une grosse machine.

21 - A la paix sociale, le skinhead situationniste privilégie le conflit social, seul espace d’exercice critique des situations révolutionnaires. Refusant toute hiérarchisation, le skinhead situationniste tend à l’application de la démocratie directe et participative et s’efforce donc d’appliquer les décisions collectives en ce qu’elles amènent les individus à l’autogestion de leur vie et au bonheur collectif inaliénable. Un vrai skinhead situationniste est avant tout un individu autonome, qui produit lui-même les lois auxquelles il se soumet. Expérimenter ces lois sur soi-même au lieu de les imposer moralement aux autres est tout l’art de la création de situations révolutionnaires. Pour autant, le skinhead situationniste n’est pas un individualiste, il sait que ce qui est bon pour lui est bon pour sa classe et inversement. Il rejette toute dérive communautariste aussi bien que tout "libéral libertarisme" prôné par le gauchisme individualiste (se réclamant la plupart du temps de l’anarchisme ou du plus vil aparatchisme) qui ne veut qu’être calife à la place du calife. Pour le skinhead situationniste, en digne fils (et fille) de la classe ouvrière, point n’existe de substitut autre au calife que de vrais conseils populaires, approuvés et révocables par tous car tous participeront.

22 - Une des tâches historique du skinhead situationniste est de faire sortir sa culture du système spectaculaire marchand ou mieux, de la créer hors de ce système. Ainsi, il revendique et soutient toute production alternative visant à contrecarrer les calculs marchands des profiteurs du "business" culturel. Si le piratage sans profit et le vol à l’étalage sont largement utilisés, la création de producteurs et diffuseurs indépendants est encouragée du moment qu’elle n’utilise pas les signes et les méthodes du spectacle. Ce qui distingue fondamentalement la production alternative skinhead situationniste de celle des hippies et de leurs descendants est la volonté de détruire et remplacer le système spectaculaire marchand et non-pas d’exploiter des champs de production dans son ombre. L’alternative encouragée par les skinheads situationnistes est une alternative offensive. Toute alternative non offensive ou visant à aménager le système spectaculaire marchand sera un jour ou l’autre dévoré par ce dernier. Ce refus d’un status-quo illusoire est ce qui distingue fondamentalement le skinhead situationniste du skinhead d’appartement (et de son avatar moderne, le cyberskin), consummateur de sa propre existence.

23 - Enfin, le skinhead situationniste méprise tout individu affirmant que les vrais situs sont morts et les vrais skinheads aussi, que ces mouvances sont à reléguer aux oubliettes de l’Histoire avec les mots "lutte" et "classes" et que, de toute façon, la fin du dernier millénaire a vu la fin de l’Histoire. Il n’est même pas la peine de préciser que celle-ci suit son cours et qu’elle verra crever un à un les charognards de la pensée utopiste. L’utopie skinhead situationniste n’est pas irréalisable mais irréalisée. Et encore, elle se réalise au présent dans les actes de résistance quotidiens des skinheads situationnistes et dans leur quête constante du "way of life" que l’on peut résumer au vieil adage: Vivre sans temps morts, jouir sans entraves (en anglais: Sex, droogs & Rock’n’roll). L’affirmation vivante de l’existence véridique des skinheads situationnistes est une preuve de sa vérité historique. Il y a toujours des cultures populaires vivantes, il y a toujours des agités, il y a toujours des situations révolutionnaires, il y a toujours des skinheads, il y a toujours des situationnistes. Ceux qui hurlent au passéisme ne s’aperçoivent pas qu’ils sont en train de pourrir debout, de concert avec leur monde trépané et leurs ismes à rallonge. Emporterons-t-ils la nappe dans leur agonie, c’est toute la question. Mais pas un skinhead situationniste ne perdra le temps d’aller gerber sa bière sur leur tombe.


Communiqué de l’Internationale Skinhead Situationniste, Cellule Combattante Yul Brynner In Sta-Prest



De quelques termes usités à travers une assez courte unité de temps:

Skinhead: Individu aux cheveux courts, de sexe féminin ou masculin, issu de la classe ouvrière et fervent amateur de musiques jamaïcaines.

Situationniste: Celui qui s’emploie à construire des situations.

Skinhead situationniste: Membre de l’Internationale Skinhead Situationniste.

Skinhead reggae: Style de l’early reggae des années 69-71 marqué par l’utilisation de l’orgue Hammond. Par extension, musique jamaïcaine des années 60-70 écoutée par les skinheads.

Psychogéographie: Etude des effets précis du milieu géographique, consciemment aménagé ou non, agissant directement sur le comportement affectif des individus.

Psychogéographique: Ce qui manifeste l’action directe du milieu géographique (et de son contenu socio-culturel) sur l’affectivité.

Dérive: Mode de comportement expérimental lié aux conditions de la société urbaine: technique du passage hâtif à travers des ambiances variées. Se dit aussi, plus particulièrement, pour désigner la durée d’un exercice continu de cette expérience.


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Message par Jul » 02 nov. 2006 12:21

Chéri-Bibi a écrit :Plutôt que de chercher à nous contacter, devenez nous, soyez vous.
Déjà fait :
Medef inna Babylone a écrit :Ils sont parmi nous, nous sommes parmi eux.
;) :!:
(euh par contre sur la chemise africaine sous un costard trois boutons, si t'espère recruter avec çà...)
Ils sont parmi nous, nous sommes parmi eux...

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martin P.C.
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Message par martin P.C. » 02 nov. 2006 12:23

j'y ai cru, j'y crois encore, j'y ai cru, j'y crois plus fort!
:banderole1: (wunderbach!)

Asylum
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Message par Asylum » 02 nov. 2006 12:45

Ceci dit Chéri Bibi, je connais plein d'anarchopunx qui correspondent pas à ta définition... même si je m'habille en noir, que mes docs sont troués, que j'ai un badge ALF et des lacets verts, j'ai pas de casquettes !

Non mais.

Pis c'est quoi un anarchopunk ?
"Nous considérons les fins inséparables des moyens, parce que les méthodes de lutte laissent déjà entrevoir la vie pour laquelle nous nous battons".

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