Préjugés, sexisme: combat permanent

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Bibo
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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par Bibo » 03 avr. 2013 20:55

Donc si je suis ta logique, tout groupement qui a moins de 25000 adhérents ne représente rien (et a fortiori ne peut-être considéré comme un syndicat). C''est une logique qui se défend... mais qui risque de nous amener dans des discussions qui vont déborder du cadre de ce topic
Certes :lol:
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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par MélusineCiredutemps » 03 avr. 2013 22:26

Alors Comme ça Abfab, les témoignages de Salomée Miroir, Rebecca Mott, Nelly Arcan, Jeanne Cordelier, Angel K et tant d'autres qui se sont exprimées en tant que prostituées et anciennes prostituées, n'a aucune valeur...
Sont-elles de vilaines moralistes d'après toi ? D'affreuses puritaines qui chouines alors qu'elles ont / ont eu la "chance" d'exercer un "métier" de "feignasses" (pour reprendre les expressions de Salomée Miroir) . Les personnes prostituées ne sont pas nées prostituées. Elles ne le sont pas par essence et ce n'est donc pas étonnant que toutes n'aient pas exactement le même point de vue sur leur condition. Cependant, celles qui disposent d'une plus grande liberté d'expression sont des anciennes (dont l'extrême majorité est abolitionniste) parce que tant qu'on est prostituée on ne peut pas s'exprimer et agir librement du fait même de tout ce qu'implique le système prostitueur. On peut observer des points communs et des correspondances dans leurs témoignages et leurs analyses, comme pour les victimes d'inceste (les prostituées qui ne sont pas "importées" par des réseaux de traite humaine sont d'ailleurs souvent d'anciennes victimes d'inceste). Même dans les propos tenus par des "travailleuseurs du sexe" il y a parfois des détails qui trahissent leur confusion ou leur ambivalence, des "loupés" et des lapsus qui révèlent une vulnérabilité produite par un vécu traumatique. Chacun-e choisira de retenir la parole des un-e-s ou des autres en fonction de son éthique personnel. Par contre, prétendre que les collabos du strass sont "les" prostitué-e-s, ça ce n'est pas honnête. Oui, les "collabos" oui, je choisi ce mot car la prostitution est l'un des systèmes d'oppression les plus atroces, les plus sordides et les plus pervers. Et pour faire l'amalgame entre prostitué-e-s et prostitution afin de défendre la prostitution en prétendant défendre les prostitué-e-s faut vraiment être tordu-e. C'est comme défendre l'esclavage en prétendant agir dans l'intérêt des esclaves (à ce propos, il y a eu une minorité d'esclaves collabos qui se positionnaient activement contre l'abolition de l'esclavage. Aurais-tu retenu leurs "arguments" au détriment de tous les autres esclaves ?).
En ce qui concerne la notion de "morale", tu pourras lire, dans le post qui suit des citations qui en disent long sur ce que les fondateurs de l'église catholique pensaient de la prostitution. :twisted:
Et au fait, dans le post qui suit, il est aussi question des fondateurs du strass, à savoir l'association "Les Putes" (n'étant pas parisienne, j'ai appris en lisant le texte signé par le CAF (et drôlement bien documenté avec des liens vers des éléments de preuves...) qu'il s'agissait des mêmes individus.
Modifié en dernier par MélusineCiredutemps le 03 avr. 2013 22:41, modifié 1 fois.

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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par MélusineCiredutemps » 03 avr. 2013 22:31

Prostitution : liberté sexuelle ou liberté de consommer du sexe ?


Depuis des siècles, la prostitution est l’un des piliers fondamentaux de la domination masculine. A présent, même si les personnes prostituées ne sont pas toutes des femmes, elles s’identifient rarement comme appartenant à une catégorie identitaire de genre masculin. Ce qui n’est pas le cas de la clientèle. La prostitution alimente le mythe d’un « besoin sexuel » supérieur chez les hommes et celui d’une vénalité « naturelle » chez les femmes qui ne consentiraient que dans le cadre d’un échange pour obtenir autre chose qu’un rapport sexuel.

Selon les schémas du patriarcat, un homme se définit par lui-même, sa sexualité n’aura pas d’incidence majeure sur son identité, par contre une femme est définie par rapport aux hommes, et de sa sexualité découlera l’identité que la société lui attribuera. Cela se confirme, entre autre, par l’observation des habitudes langagières. Par exemple, l’usage quotidien et administratif imposant le qualificatif intrusif et infantilisant du terme « mademoiselle » aux femmes célibataires (ou supposées l’être) ainsi qu’aux petites filles induit l’idée selon laquelle l’intimité d’une humaine doit être étalée sur la place publique. De même, certaines administrations attribuent d’office à une femme mariée le nom de son époux même lorsqu’il apparaît clairement qu’elle ne l’a pas choisi, et feignent d’ignorer qu’un homme marié peut porter le nom de son épouse.

Sous l’Antiquité à Rome et en Grèce, la prostitution était encouragée pour préserver la famille patriarcale. Le système patriarcal construit, pour se pérenniser, des carcans identitaires auxquels les femmes doivent se conformer. Ils se divisent en deux grandes catégories : la femme « purifiée » qui appartient à un seul homme, est lavée de son « impureté originelle » en accédant au rôle sacralisé de « la mère qui enfante dans la douleur » (ex : la ménagère fidèle dont la sexualité est niée à l’image de la « vierge » marie), et celle qui est « impure », appartient à tous les hommes et sert de réceptacle aux « pulsions sexuelles » des dominants afin de préserver la « vertu » de l’autre femme (la prostituée qui n’existe qu’à travers une sexualité dont elle est dépossédée).

Objets sacralisé ou méprisé, on les oppose alors qu’elles sont les deux facettes de la même femme aliénable ou aliénée, jamais propriétaire d’elle même. Il existe de multiples formes de relations prostitutionnelles qui ne sont pas reconnues comme telles (ex : dépendance économique et "devoir conjugal" des "femmes au foyer"). La prostitution participe à leur maintien au travers des représentations qu’elle véhicule par sa simple existence. Elle encourage la volonté de toute puissance des individus qui préfèrent payer plutôt que prendre le risque de vivre des relations sexuelles égalitaires. « Mais ce qu’ils achètent, en un sens, c’est le pouvoir. Nous sommes censées nous conformer à leur bon plaisir. Ils nous dictent leur volonté et nous, nous devons leur plaire, obéir à leurs ordres. Même dans le cas des masochistes, qui aiment obéir, c’est encore sur leur ordre à eux que nous les commandons. La prostitution rabaisse non seulement les femmes, mais aussi le sexe... oui, elle rabaisse le sexe.[...] il y a dans la prostitution une indignité particulière, comme si le sexe était une chose sale et que les hommes ne pouvaient en jouir qu’avec quelqu’un de bas. Ça implique une espèce de mépris, de dédain, et une sorte de triomphe sur un autre être humain. » (1)

Dès le Moyen Âge, l’Eglise est favorable à la prostitution. « « Supprimez les prostituées, disait saint Augustin, vous troublerez la société par le libertinage. » Et plus tard saint Thomas [...] déclare : « Retranchez les femmes publiques du sein de la société, la débauche la troublera par des désordres de tous genre. Les prostituées sont dans une cité ce qu’est le cloaque dans un palais : supprimez le cloaque, le palais deviendra un lieu malpropre et infect. » » (2). « Et Mandeville dans un ouvrage qui fit du bruit : « Il est évident qu’il existe une nécessité de sacrifier une partie des femmes pour conserver l’autre et pour prévenir une saleté d’une nature plus repoussante. » » (3).

« A mon avis, la conviction que les femmes sont sales, que les organes génitaux sont sales, nous colle vraiment à la peau. Si je n’aime pas qu’un type me jouisse dessus, je croie que c’est pour ça. Parce que je me trouve sale. Je n’aime pas ça parce que j’ai l’impression que je suis sale... et qu’eux ne le sont pas. Peut-être qu’eux, ça les lave. Le fait qu’on se croie sale est très important. » (1). Il est donc clair qu’en réalité, l’idéologie puritaine rejette la liberté sexuelle et non la prostitution car cette dernière lui sert d’exutoire. Les puritain-e-s ont intérêt à entretenir la confusion entre les deux pour occulter l’existence potentielle ou vécue d’une jouissance inaliénable.

On peut constater que l’Eglise a réussi son entreprise de conditionnement mental durable et profond car la prostitution remplit toujours son rôle de force de répression contre la libération des personnes dominées en imposant l’image d’une vénalité « naturelle » et le sentiment de culpabilité dans leur sexualité. « L’une des pires choses, c’est de faire semblant. Il fallait mimer l’orgasme. Les hommes l’attendent parce que c’est la preuve de leur virilité.C’est une des pires choses. Ça, c’est vraiment se conduire en putain, cette malhonnêteté. » (1)

Au contraire, la véritable liberté sexuelle fait du désir et de la jouissance de chaque personne une fin en soi et exclut les « non-dits », la simulation ainsi que les rapports de domination. Les « travailleu-se-r-s du sexe » qui réclament la règlementarisation de la prostitution déclarent souvent ne pas vendre leur corps mais un « service sexuel ». Ce « service » se traduit quoi qu’il en soit par une mise à disposition du corps. Une sorte de location, comme si le corps d’une personne était un objet... un objet extérieur à elle-même. Et c’est à ce rapport de chosification et de division avec leur propre corps que les personnes prostituées sont contraintes de se soumettre pour satisfaire les exigences de leur clientèle. Cette vision réductrice du corps devenu objet est banalisée car profondément intégrée dans les mentalités. Ils influencent les prises de position des réglementaristes et des légitimistes qui accusent les abolitionnistes de puritanisme. Il est pourtant le fruit du conditionnement mental puritain qui consiste à vouloir séparer ce qui est supposé être « le corps » de ce qui est supposé être « l’esprit » en les plaçant dans un rapport hiérarchique. Puisque le corps est jugé « inférieur », il peut alors servir d’ustensile, d’outil de travail.

Cette division hiérarchique sert aussi de support à l’exploitation capitaliste en général, qu’elle se traduise par le salariat où par n’importe quel autre forme de rapport marchand. Cependant, dans la prostitution ce ne sont pas seulement certaines parties du corps qui sont utilisées, mais le corps tout entier selon les envies du client qui, comme dans tous commerce est « roi ». « Le pire, dans la prostitution, c’est qu’on est obligé de vendre, non seulement son sexe, mais aussi son humanité. C’est ça le pire : ce qu’on vend, c’est sa dignité humaine. » (1)

Le mot « travail » vient du latin « tripalium » qui désignait un instrument de torture. Et jusqu’à maintenant, il a gardé son sens premier : la souffrance, la pénibilité, le tourment. Il inclut un sens sacrificielle et appartient à la morale religieuse : « Tu travailleras désormais à la sueur de ton front [...] » (La Genèse). D’ailleurs, le « Qui ne travaille pas ne mange pas. » de St Paul fait écho à la morale capitaliste et à ses conséquences désastreuses. Pour vivre (ou survivre) il faudrait se soumettre à l’obligation de sacrifier son temps et son corps, gâcher une partie plus ou moins importante de sa vie et de sa santé dans la souffrance.

Avec le développement de la bourgeoisie, le sens de ce mot s’est élargi à celle d’activité marchande, l’inscrivant ainsi dans la dimension de l’échange qui induit la compétition entre les individus et leurs inégalités économiques et sociales. L’idéologie du travail s’impose et emprisonne les personnes dans cette obligation du « don – contre don » qui sert de justification « indiscutable » à la domination et à l’exploitation. Par conséquent, il n’est pas étonnant que le travail soit une valeur d’extrême droite. A l’entrée du camps de concentration d’Auschwitz il était écrit « Le travail rend libre » et la devise du Maréchal Pétain était « Travail, Famille, Patrie ».

Pour que le travail soit aboli, il faudrait que les activités utiles soient distribuées et exercées dans une dynamique de partage et de gratuité qui prenne en compte les besoins et les désirs de chaque personne, et non dans un maintien des rapports marchands qui, eux, sont basés sur une logique d’échange.

D’autre part, par le biais de la pornographie commerciale dite « professionnelle », de la publicité sexiste et des différentes formes de prostitutions, le capitalisme a intérêt à faire passer la consommation de sexe pour de la liberté sexuelle. Elene Vis, fondatrice de « l’école du sexe » au Pays-Bas déclare à ses élèves « Vous pouvez parler de techniques de vente. Vous devez vous vendre et peu importe qu’il s’agisse de votre propre corps ou d’aspirateurs. Le principe est le même ». Vouloir qu’un acte sexuel puisse être un « service » rendu dans le cadre d’un échange revient à vouloir défendre l’idée selon laquelle les personnes dominées doivent « naturellement » s’abstenir de rechercher le plaisir pour elles-mêmes. C’est vouloir que la sexualité soit un produit qui se vend plutôt qu’un plaisir qui se partage. La prostitution, c’est l’aliénation de la sexualité au capitalisme !

Vouloir la création d’un statut professionnel de "travailleu-se-r-s du sexe" c’est reconnaître une utilité sociale à la prostitution, c’est adhérer à la morale puritaine, à la marchandisation et au patriarcat. La prostitution ne représente aucun danger pour le système. Au contraire, elle est à son service et le sert avec une efficacité redoutable lorsqu’elle se revendique « librement choisie ».

La loi Sarkozy contre le « racolage passif » criminalise les personnes prostituées les plus vulnérables. L’écrasante majorité d’entre elles n’ont pas choisi de se prostituer parce qu’elles en éprouvaient le désir, mais pour survivre en espérant que cette situation sera temporaire. Pourtant ce n’est pas à elles que les médias capitalistes et machistes ont donné la parole au moment de la promulgation de cette loi, mais à des commerciales du sexe ultra minoritaires qui s’inscrivent dans une démarche règlementariste et/ou légitimiste et non pas révolutionnaire, revendiquant le titre de « travailleu-se-r-s du sexe ». Leur argument central est que la prostitution serait majoritairement un « choix professionnel », et que son existence serait une nécessité.

C’est ce que pensent également les anti-féministes (comme par exemple Eric Zémmour), dont celles et ceux qui, comme Elizabeth Badinter, affichent une étiquette de « féministe ». Le discours de Christine Boutin et Chantal Brunel (députée UMP de Seine-et-Marne) est plus hypocrite encore, car tout en admettant que la prostitution est une violence faite aux femmes, elles préconisent la réouverture des maisons closes.

On entend souvent « Si elles déclarent que c’est un choix, où est le problème ? ». D’une part elles sont ultra-minoritaires à déclarer que « c’est un choix » même si elles s’expriment au nom de toutes. D’autre part, qu’entendons-nous par « c’est un choix » ? Dans le cas d’un objet, « l’essence – c’est à dire l’ensemble des recettes et des qualités qui permettent de le produire et de le définir – précède l’existence » (J-P Sartre). Le concept « table » précède et conditionne la fabrication de tables. A l’inverse, pour les humain-e-s, l’existence précède l’essence car aucune divinité n’est à l’origine de notre « création ». « Il n’y a donc pas de nature humaine puisqu’il n’y a pas de dieu pour la concevoir » (J-P Sartre). Nous existons d’abord, nous nous définissons ensuite par l’ensemble de nos actes. Chaque personne est donc responsable de ce qu’elle est, car elle n’est pas l’oppression qu’elle subit ni l’un de ses actes isolé des autres. Elle est ce qu’elle choisi de faire et de dire dans les limites de la marge de manœuvre dont elle dispose qui dépend du contexte dans lequel elle se trouve. Elle est son propre projet, le fruit de ses choix, de ses choix uniquement, et l’injustice dont elle est la cible ne la définit absolument pas. Être conscient-e-s nous oblige en permanence à faire des choix car nous n’avons pas d’instinct pour nous dicter notre conduite.

La responsabilité que la condition humaine nous confère peut être angoissante, mais elle est aussi le signe de nos libertés potentielles. La plupart des choix sont des choix par dépit, des choix stratégiques de survie ou d’auto-destruction matérielle et/ou psychique, plus rarement, nous estimons avoir l’opportunité de choisir par désir. Tout acte humain est donc le résultat d’un choix, mais ce choix est la plupart du temps un consentement sans désir. Au sein des armées, il y a des individus qui y sont entrés volontairement, parce qu’ils adhèrent à l’idéologie militariste. Il y a aussi des personnes qui y sont entrées volontairement, mais sans désir ni conviction, parce qu’elles ne voyaient pas d’autre moyen pour survivre. Et il y en a aussi qui sont enrôlées de force, parmi elles certaines font le choix de tenter une évasion et d’autres se suicident.

On ne peut pas défendre la liberté sexuelle en se satisfaisant de la notion de consentement (qui d’ailleurs convient parfaitement à la justice étatique dans de nombreux cas de viols). Il est très fréquent qu’une personne consente à avoir une relation sexuelle, non pas parce qu’elle en éprouve le désir mais parce qu’elle pense qu’elle le doit, ou estime ne pas pouvoir s’y soustraire sans prendre de risques qu’elle ne pourrait supporter. Une passe, c’est un viol tarifé !

L’expression « liberté de choix » avancée dans les discours réglementaristes sonne creux... Au travers de son utilisation, il apparaît une confusion entre la définition de la liberté dans la doctrine libéraliste et la définition de la liberté d’un point de vue anarchiste. Pourtant, d’un côté on s’inscrit dans un système de compétitions et de performances qui répartie les possibilités d’exercer le libre arbitre de manière inégale. De l’autre côté on estime que la véritable liberté, celle pour laquelle on se bat, ne peut s’accomplir que dans l’égalité économique et sociale inconditionnelle. Il est évident que ces deux définitions s’opposent même si les « travailleu-se-r-s du sexe » déclarent choisir leur clientèle et prétendent aimer « le sexe ».

Mais il y a aussi des personnes prostituées qui choisissent de demander de l’aide aux services sociaux et aux associations abolitionnistes pour trouver la force et les moyens de quitter la prostitution. Je suppose qu’elles ont leurs raisons... leurs situations sont compliquées et elles sont très nombreuses aux regard des moyens dont disposent ces services sociaux et ces associations. En faisant l’apologie de la prostitution, les « travailleu-se-r-s de sexe » font un choix idéologique et politique ultra-libéraliste et non libertaire, de la propagande par l’acte contre la liberté sexuelle. « Une liberté qui ne s’emploie qu’à nier la liberté doit être niée », Simone de Beauvoir. Adhérer à leurs discours n’est pas compatible avec une quelconque solidarité a l’égard de l’écrasante majorité des personnes prostituées.

C’est facile de se proclamer « de gauche », voir « libertaire » comme le font certains individus favorables à la prostitution. Certains groupuscules et partis d’extrême droite se prétendent bien anti-racistes et/ou féministes, eux aussi... C’est un moyen très efficace pour brouiller les pistes que de se vautrer, avec une bonne rhétorique, dans la malhonnêteté intellectuelle avec ou sans paillettes. Pour l’auditoire, il peut apparaître plus confortable de se blottir dans le voile rassurant d’une négation bien ficelée. Il y a bon nombre de lâches et de crédules avides de clichés nourrissant leurs fantasmes de domination pour croire à des déclarations proférées par des personnes qui s’autoproclament représentatives parce qu’elles parlent beaucoup plus fort que les autres. Par contre c’est très compliqué, pour le plus grand nombre des personnes prostituées de faire entendre leur véritable point de vue. Non seulement parce que les médias ne leur donnent que très rarement la parole, mais aussi parce que dans la prostitution le mensonge et la simulation sont obligatoires, vis à vis de la clientèle avérées ou potentielles, des « collègues », et des proxénètes, c’est une question de survie.

Alors, entre l’écrasante majorité des personnes prostituées qui ne disposent pas de la marge de manœuvre nécessaire pour s’exprimer librement, et les « travailleu-se-r-s du sexe » qui utilisent les médias pour vanter les mérites de la servitude sexuelle volontaire, il y a effectivement une différence fondamentale.

Il est aberrant de croire que quiconque a la capacité de parler à la place, ou au nom de l’ensemble des personnes prostituées. Cela reviendrait à croire qu’elles ont toutes le même point de vue. C’est nier une grande part de ce qui fait leur condition humaine, à savoir leurs subjectivité. Parmi les personnes sans-papiers, il y en a qui se battent pour la régularisation de tout le monde et pour la liberté de circulation inconditionnelle. Il y a aussi des sans-papiers qui défendent la régularisation au cas par cas, et même des personnes régularisées qui exploitent des nouve-lles-aux sans-papiers. De nombreuses personnes sans-papiers sont isolées et épuisées par tout ce qu’elles supportent et estiment ne pas avoir la force de se battre dans une dimension collective. Il y a des femmes victimes de violences conjugales qui se révoltent, s’organisent et/ou vont chercher de l’aide pour échapper à leurs oppresseurs. D’autres croient avoir mérité les coups qu’elles ont reçu. Et certaines pensent que lorsque cela arrive à la voisine, cette dernière « l’a bien cherché ». Je pourrais multiplier les exemples d’exploitation, d’oppressions, d’aliénations et de stigmatisations, on retrouve partout la même diversité d’opinions.

Quand on a la chance de pouvoir s’exprimer librement, il est plus honnête d’admettre sa propre subjectivité et de l’assumer. Ma subjectivité, quant à elle est influencée par l’idéologie à laquelle j’adhère. Et elle me conduit à choisir mon « camp », du côté des personnes prostituées, et non de celui des « travailleu-se-r-s du sexe ».

L’Etat français se prétend abolitionniste alors que sa politique est un mélange de règlementation (prélèvement d’impôts sur les revenus des personnes prostituées, reconnues par le Trésor Public comme « Travailleurs indépendants », ce qui les condamne à une rentabilité accrue, participe à leurs fréquents endettements et fait de l’Etat le premier proxénète de France) et de prohibition (lois contre le « racolage passif »). La confusion entre abolitionnisme et prohibitionnisme est récurrente dans les discours des réglementaristes. Le prohibitionnisme, comme le réglementarisme découlent logiquement de tout système étatique et/ou capitaliste. Alors que l’abolitionnisme est la position la plus cohérente avec les valeurs fondamentale du communisme libertaire révolutionnaire.

Un des arguments du réglementarisme est basé sur la croyance en une amélioration de la situation sociale et sanitaire des personnes prostituées. En réalité, il leur impose un contrôle médical accompagné d’une inscription sur les registres policiers. Il fait le jeu des proxénètes qui bénéficient d’une forte complicité de la part de la police. Et les personnes prostituées préfèrent majoritairement la clandestinité à ce fichage qui scelle leur ancrage dans la prostitution.

Dans le cadre d’une réglementarisation complète de la prostitution, il serait logique que le Pôle Emploi tente d’imposer aux chomeu-se-r-s en fin de droit des postes de « travailleu-se-r-s du sexe » dans les maisons « ouvertes » de C. Brunel. Les politiques réglementaristes et prohibitionnistes sont présentées comme opposées, pourtant leurs effets se ressemblent... Une des revendications des associations de « travailleu-se-r-s du sexe » est la légitimation de la prostitution. L’association parisienne « LesPutes » par exemple, proposent la création d’écoles européennes qui formeraient des « expert-e-s », c’est-à-dire des personnes dont les compétences sexuelles seraient supérieures à celles des autres. Ceci ne pourrait que renforcer la présence, déjà envahissante, des notions de performance, de compétition et de concurrence dans la sexualité, ce qui correspond, là encore, à une conception de la liberté sexuelle ultra-libéraliste et non libertaire.

Quelques "travailleu-se-r-s du sexe" regroupé-e-s dans ces associations règlementaristes et légitimistes s’insurgent contre ce qu’elles nomment une « victimisation » de la part des abolitionnistes. Cependant, elles victimisent volontiers leur clientèle, notamment avec des slogans comme « Touche pas à mon client ». Le statut de victime n’est pas une identité dégradante mais le résultat d’une situation injuste, et sa prise de conscience est nécessaire à la révolte et au désir de libération. Se reconnaître et être reconnu-e comme victime est la première étape d’un processus qui va permettre à la personne de se reconstruire et de se libérer du sentiment de culpabilité induit par les humiliations. C’est aussi pour cela qu’il est important de s’opposer à la véritable victimisation, celle des coupables que sont les prostitueurs, clientèle et proxénètes en tête. Car en victimisant les coupables on culpabilise les victimes et on tombe dans une sorte de négationnisme. Très à la mode en ce moment, le rejet de la notion de victime résulte d’un narcissisme fondé sur l’admiration de l’image du dominant. Et de fait, ce rejet est totalement anti-subversif. En effet, s’il n’y a pas de victime, alors c’est qu’il n’y a pas d’injustice et aucune raison de combattre, ni même de critiquer ce « merveilleux » système. Les pro-prostitution, « travailleu-se-r-s du sexe » ou pas, nient la sordide réalité du vécu concret de l’écrasante majorité des personnes prostituées, de la traite de centaines de milliers d’ humain-e-s dont certain-e-s sont des enfants et des profits financiers qu’elle génère pour les proxénètes.

Lorsque le capitalisme, le puritanisme et le patriarcat auront été abolis, la prostitution sous toutes ses formes aura disparu !

Alors battons nous pour de meilleurs droits pour tou-te-s, des droits inconditionnels et non soumis au statut de « travailleu-se-r du sexe » (ni même de travailleuse-r de quelque domaine que ce soit). Pour l’égalité économique et sociale !

Pour la suppression des lois qui taxent, criminalisent et empêchent les personnes prostituées de s’échapper de la prostitution !

Pour l’annulation totale des dettes qu’elles ont contractées ! Pour une augmentation conséquente des montants de minimas sociaux, assortie de la suppression de l’obligation qui incombe aux bénéficiaires de « s’inserrer professionnellement » !

Pour une augmentation conséquente des moyens attribués aux associations et services sociaux abolitionnistes afin de pouvoir proposer à toutes les personnes prostituées un accompagnement social et un accès à des soins adaptés.

Régularisaton durable et sans condition de tou-te-s les sans-papier ! Pour une véritable liberté de circulation et d’installation et l’accès aux même droits pour tou-te-s !

Pour une éducation sexuelle fondée sur la valeur inaliénable de la sexualité de chaque personne !

Mélusine Ciredutemps

(1) Témoignage de J, ancienne prostituée, dans : La prostitution. Quatuor pour voix féminines de Kate Millett (Denoël Gonthier – collection femme)
(2) Simone de Beauvoir Le deuxième sexe Tome1
(3) Simone de Beauvoir Le deuxième sexe Tome2

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Pour approfondir la réflexion :

. L’excellent roman autobiographique de Jeanne Cordelier "La Dérobade" (Phébus), qui raconte les quatre années de sa vie durant lesquelles elle était prostituée.

. "Anarchisme, féminisme, contre le système prostitutionnel" Hélène Hernandez et Elisabeth Claude (Editions du Monde Libertaire).

. "Femmes Libres" de Mary Nash (La pensée sauvage) qui met en lumière l’organisation féministe et anarchiste espagnole « Mujeres Libres » de 1936 à 1939.

. "Planète sexe" de Franck Michel à propos du tourisme sexuel et de ses liens avec les autres formes de prostitution (Editions Homnisphères).

. L’article de Mona Chollet " Prostitution : les pièges du pragmatisme", sur « périphérie.org » (malgré un désaccord concernant le rapport prostitutionnel dans le mariage à l’époque où Simone de Beauvoir a écrit Le Deuxième Sexe).

. Le téléfilm en deux parties du réalisateur David Yates : "Sexe trafic".

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Cet article peut être imprimé sous forme de brochure illustrée à partir du site du Collectif Libertaire Anti-Sexiste (dans la rubrique "brochures") :

http://coll.lib.antisexiste.free.fr/

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Une première version, moins approfondie, de cet article a été publiée dans le Courant Alternatif d'avril 2008 (n°179) et est en ligne sur le site internet de l'Organisation Communiste Libertaire:

http://oclibertaire.free.fr/spip.php?article337

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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par Bibo » 04 avr. 2013 10:25

Juste un truc : c'est pas parce qu'un syndicat défend un truc que ce truc est juste. Pour rappel, on a des syndicats qui défendent les usines d'armement, l'industrie nucléaire, etc ... Le fait que des gens luttent pour une cause ne fait pas nécessairement de cette cause une cause juste.
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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par Dogmus Inquisitorum » 05 avr. 2013 17:46

juste un truc : si, comme je le comprends, le STRASS défend les travailleuses (y'a-t-il des hommes ?) du sexe sans patrons (ou alors il faut m'expliquer), qui est alors plus à assimiler à une profession libérale qu'a du salariat.
En ce sens il ne faut peut-être pas avoir les réflexes habituels qu'on a quand on parle de "syndicalisme" ?

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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par abFab » 05 avr. 2013 21:49

Pffiou... je suis juste intervenu ici pour contrebalancer le flood abolitionniste. Parce que oui c'est du flood. Ici c'est un forum, on est pas obligé de copier-coller l'intégralité de textes que l'on peut lire ailleurs. Si on le fait c'est qu'on instrumentalise le lieu pour servir de caisse de résonance au message, ce qui ne me dérange pas pour certains sujets (comme NDDL), mais me gène quand il s'agit de théories dont je ne partage pas le contenu ni l'objectif.
Et comme ça me gène, je contre-balance.

Je m'attendais à me faire troller, ça n'a pas loupé : un trollage suivi d'un flood, manchette balayette.


Je ne fais pas partie des travailleurs du sexe et je n'ai aucune envie de parler à leur place. Et ça tombe bien, car contrairement à d'autres qui ont visiblement plein de temps pour ça, moi du temps libre j'en ai pas des masses et surtout pas pour ça. Bon bref...


"Alors Comme ça Abfab, les témoignages de Salomée Miroir, Rebecca Mott, Nelly Arcan, Jeanne Cordelier, Angel K et tant d'autres qui se sont exprimées en tant que prostituées et anciennes prostituées, n'a aucune valeur...
Sont-elles de vilaines moralistes d'après toi ? D'affreuses puritaines qui chouines alors qu'elles ont / ont eu la "chance" d'exercer un "métier" de "feignasses" (pour reprendre les expressions de Salomée Miroir) [...]
"

Rien que pour analyser toute la morgue et le mépris qu'il ya dans ces deux phrases il faudrait y passer des heures.
C'est d'ailleurs finalement le principal reproche que je te fais, Melusine. Tu n'es pas sur un forum abolitionniste, et au lieu de nous informer des tenants et des aboutissants, tu nous inondes de ta propagande, tu relayes des textes agressifs à l'encontre d'un syndicat qui défend des positions opposées aux tiennes... en gros tu présupposes tranquillou qu'on est tous d'accord avec toi et qu'on va applaudir des deux mains.
Ce n'est pas le cas.


Mon post était une réaction à une attaque en règle (et vu le nombre de textes agressifs qui sortent en même temps on pourrait allègrement parler de cabale) contre le Strass. Tu as publié ici, in extenso, deux textes accusateurs contre le strass, tous deux émanants de groupes féministes. Alors venir m'interpeller ainsi : "Alors Comme ça Abfab, les témoignages de Salomée Miroir, Rebecca Mott, Nelly Arcan, Jeanne Cordelier, Angel K et tant d'autres qui se sont exprimées en tant que prostituées et anciennes prostituées, n'a aucune valeur..." , désolé mais je vois pas le rapport avec la choucroute. J'ai beau chercher mais tes textes (auxquels je réagissais, donc) ne sont signés que de groupes qui s'expriment sur la prostitutions sans qu'aucun ne soit composé de travailleur(se)s du sexe. Les témoignages auxquels tu fais références, je ne les connais pas.

Et quand bien même.


"Alors Comme ça Abfab, les témoignages de Salomée Miroir, Rebecca Mott, Nelly Arcan, Jeanne Cordelier, Angel K et tant d'autres qui se sont exprimées en tant que prostituées et anciennes prostituées, n'a aucune valeur..."

Pourquoi en auraient-ils plus que les travailleu(r)ses du sexe qui témoignent dans le film du même nom ??
Pourquoi en auraient-ils plus que les prostitué(e)s regroupé(e)s au sein du Strass ??

Ce n'est pas parce que le medef exhibe une liste de personnes souhaitant travailler le dimanche que ça en fait un interlocuteur crédible dans le processus d'émancipation des travailleurs.


Ton premier texte commence d'ailleurs ainsi :
"Aborder la prostitution en termes syndicaux est trompeur – et faussement solidaire avec les femmes prostituées -"
Dès le départ il pose bien les choses ; il va parler de solidarité avec les femmes prostituées. Ces pauvres petites choses qui ne savent pas s'exprimer toutes seules... Et donc on va nous expliquer ce qu'est la vraie solidarité avec les femmes prostituées.



> "C'est comme défendre l'esclavage en prétendant agir dans l'intérêt des esclaves (à ce propos, il y a eu une minorité d'esclaves collabos qui se positionnaient activement contre l'abolition de l'esclavage. Aurais-tu retenu leurs "arguments" au détriment de tous les autres esclaves ?)."

Je ne comprends rien à la métaphore. Moi je dis que l’émancipation des travailleurs viendra des travailleurs eux-mêmes. Donc, dans ton exemple, je dirais que ceux qui parlent au nom des esclaves mais ne sont pas esclaves sont moins légitimes que les esclaves eux-mêmes regroupés en association.

Je lis (petit à petit) "une histoire populaire des états-unis", et récemment je suis passé par le chapitre consacré à l'émancipation des noirs. Howard Zinn écrit :

<<Les noirs devaient lutter en permanence contre le racisme inconscient des abolitionnistes blancs. Ils devaient également insister pour avoir à la parole. Douglass écrivit pour le Liberator jusqu'en 1847, date à laquelle il mit sur pied son propre journal à Rochester, le North Star [...]. En 1854, une assemblée de Noirs proclama : "Il s'agit avant tout de notre combat. Personne d'autre ne peut lutter à notre place [...] Nos rapports avec le mouvement anti-esclavagiste doivent changer, et ont déjà changé. Au lieu de dépendre de lui, nous devons le diriger">>


Alors vas-y, pousse ta métaphore sur l'esclavage et comprends bien que c'est sympa de s'acharner à vouloir parler au nom des prostitué(e)s, mais il ne faut pas s'étonner qu'à un moment, ils/elles veuillent prendre la paroles et parler en leur propre nom.

Et il en a toujours été ainsi au cours de l'histoire, les black panthers ont fini par dire aux blancs de la fermer, et le MLF a fait pareil avec les hommes.
Les dirigeants de ce pays sont des abolitionnistes non prostitué(e)s : il faut comprendre qu'à un moment donné le corps social des prostitué(e)s en ait ras le bol que ces soit des abolitionnistes non prostitué(e)s qui s'expriment en leur nom.

Alors moi quand je vois un flot d’agressions envers un corps constitué de prostitué(e)s non abolitionnistes, ça me hérisse le poil et j'y vois un moyen pour la classe dominante de reprendre le dessus et de faire taire ces braillard(e)s qui ont l'outrecuidance de vouloir parler en leur nom et de rejeter la représentation extérieure.


C'est fou ça de vouloir faire le bonheur des gens contre leur grès et sans leur accord.
Contre la traite des êtres humains il ya dèjà des arsenaux judiciaires ; on va pas interdire la filière du textile au prétexte qu'il ya des ateliers clandestins.
Pour arrêter la prostitution étudiante (qui semble massive selon certains syndicats), il faut en finir avec ces études hors de prix ; construire des résidences universitaires, réévaluer les bourses...
Pour endiguer la prostitution des mères célibataires obligées de tapiner pour manger et nourrir les gosses (et c'est pas un clichés genré c'est une réalité sociale), il faut au minimum revoir les allocations mais surtout repenser tout ce système merdique basé sur la précarisation des femmes (largement plus touchées que les hommes).

A quoi ça sert de criminaliser le client, d'obliger une populations à se planquer pour exercer son activité, si ce n'est à rendre la vie de celles qui souffrent le plus encore plus difficile ? Sur le papier, tu peux avoir raison autant que tu veux, mais ton combat ne fais rien qu'emmerder encore plus une partie de la population qui n'en peut déjà mais. Si cette partie de la population se regroupe et te demande gentiment (ou pas gentiment) de lui foutre la paix, de la laisser respirer un peu, moi je trouve ça logique et sain.



"Aborder la prostitution en termes syndicaux est trompeur – et faussement solidaire avec les femmes prostituées -"

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"Messieurs, j'ai refait tous les calculs. Ils confirment l'opinion des spécialistes : notre idée est irréalisable. Il ne nous reste qu'une chose à faire : la réaliser." (Latécoère)

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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par abFab » 05 avr. 2013 21:59

Bibo a écrit :Juste un truc : c'est pas parce qu'un syndicat défend un truc que ce truc est juste. Pour rappel, on a des syndicats qui défendent les usines d'armement, l'industrie nucléaire, etc ... Le fait que des gens luttent pour une cause ne fait pas nécessairement de cette cause une cause juste.
Mouais... C'est quoi une "cause juste" ?
Perso je vais pas dénoncer des positions morales d'un côté et m'amuser à estampiller "cause juste" telle ou telle lutte de l'autre.
Les syndicats qui défendent l'industrie nucléaires, ce sont plutôt des lobbys qui trainent dans les lieux de pouvoir. Après il y a des syndicats des travailleurs de l'industrie nucléaire... et c'est pas parce que tu travailles dans une centrale qu'il est "juste" que tu sois traité comme un chien. Donc qu'il y ait des syndicats de travailleurs dans l'industrie nucléaire qui luttent pour de meilleures conditions de travail ne me semblent pas une cause injuste.
Et je vois mal une orga écolo (ou simplement citoyenne) venir parler aux nom des travailleurs du nucléaires. Après la notion de sortie du nucléaire, c'est pas (à mon sens) une affaire de syndicat de travailleurs mais de politique... Après on peut enclencher la discussion sur "travailler dans une centrale nucléaire signifie t'il que l'on est contre la sortie du nucléaire?"... mais c'est pas vraiment le sujet quoi...

Nan mais plus j'y pense plus cette notion de "cause juste" me semble super vicieuse. Et surtout dans le contexte de la discussion.
Un syndicat de prof, est-ce qu'il défend une cause juste ? Parce que bon l'éduc nat, comme gardien de l'ordre social, ça se pose un peu là...
Et un syndicat de fabricant de pneus ? Vouloir conserver une usine de pneus, est-ce que c'est une cause juste ?

(Pour le public, je précise que je suis en mode taquin là ; j'ai sous la main un hors serie du monde libertaire sur "la saga des Conti", qui est vachement bien)
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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par bunko » 06 avr. 2013 10:32

..faut pas l'gonfler le ABFAB...! :lol:
le béton est armé,.. pourquoi pas vous..?
tu veux du teushi..?... oh non, tu sais moi la cuisine japonaise...

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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par Bibo » 06 avr. 2013 11:53

Bon, sur ces bonnes paroles, je me casse.
Bonne continuation.
Amusez-vous bien.
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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par MélusineCiredutemps » 07 avr. 2013 13:49

C'est bien ça... Entre d'un côté l'écrasante majorité des personnes prostituées qui ne disposent pas de la marge de manœuvre nécessaire pour s'exprimer et agir librement (sauf en ayant recours à l'anonymat, comme le fait Salomée Miroir) et les anciennes prostituées qui sont majoritairement radicalement abolitionnistes (comme Rebecca Mott), et de l'autre côté les quelques individus qui revendiquent le titre de « travailleuseurs du sexe », qui militent pour le maintien du système prostitueur et le « droit » d'acheter un permis de viol, chacun-e choisi son camp en fonction de son éthique...

Mais c'est vrai, après tout, ne pas cautionner un système fondé sur la chosification/marchandisation des êtres et de leurs corps, c'est être moraliste, et alors ça c'est mal, voyez... Parce qu'être « moraliste » c'est mal voyez...
Estimer que la liberté sexuelle n'est pas compatible avec une tarification du viol négocié c'est être moraliste, alors c'est mal, voyez...
Dénoncer le fait que l’État français et les individus qui le dirigent ne sont pas aussi abolitionnistes qu'ils le prétendent et ne mériteront pas d'être reconnus comme tel tant que les services fiscaux attribueront le titre de « travailleurs indépendants » aux personnes prostituées (ce qui implique l'obligation de payer des impôts), c'est être moraliste, voyez... Alors c'est mal voyez...
Démontrer que l'entrée dans la prostitution n'est pas déterminée uniquement par des facteurs économiques, mais aussi par le système patriarcal et toutes les violences qu'il produit et encourage (surtout au sein des familles) et qui provoquent des traumatismes qui vulnérabilisent et donne envie de crever, de s'autodétruire, c'est être moraliste, voyez... C'est mal, voyez...
Lire, écrire et diffuser des textes dans des espaces où l'on ne s'est pas préalablement assuré-e qu'on ne s'adresserait qu'à des personnes déjà convaincues, c'est mal voyez... C'est faire du « trollage », voyez... C'est faire du « flood », voyez... Et ça aussi c'est mal, voyez...

Et comme je suis très vilaine, je vais commettre encore trois mauvaises actions. Je vais vous indiquez un lien vers le site d'un réseau de survivantes de la prostitution (qui sont d'affreuses moralistes qui font du « flood ») :

http://survivorsconnect.wordpress.com/

Je vais vous inviter à lire l'un des textes de Rebecca Mott ( une horrible moraliste qui a l'arrogance de se mêler de ce qui la regarde. Et, bien évidemment, ce qu'elle écrit c'est du pur « flood ») :

"Prostitution - Silence et tapage : la limite des mots

Je veux parler de ce pourquoi il faut mettre l’accent sur les personnes qui achètent et vendent la classe prostituée, plutôt que sur les paroles de femmes qui sont surtout à l’intérieur de l’industrie du sexe.
Je parle du langage et du fait que l’on cite des femmes prostituées pour traiter des réalités de leurs conditions de vie.
J’écris cela à partir d’un sentiment de profonde frustration et d’une certaine colère à constater que l’on accorde trop souvent foi aux paroles de femmes prostituées sans tenir compte de comment et de pourquoi elles parlent.
J’écris cela à cause d’un immense silence.
D’abord, un silence des prostitueurs – personne n’entend le langage des hommes qui font le choix conscient d’acheter les personnes prostituées.
Puis, un silence des profiteurs de l’industrie du sexe – où est la recherche, les questions, l’étude des raisons pour lesquelles ces profiteurs conservent le droit de vendre les membres de la classe prostituée comme autant de marchandises sous-humaines ?
Si ce silence est aussi bruyant, c’est qu’il est entouré par le vacarme de l’écoute de la classe prostituée – une écoute qui sert habituellement à réaffirmer les préjugés qu’entretient déjà l’auditeur ou le lecteur.
La plupart des gens souhaitent que les voix des personnes prostituées leur confirment que tout va très bien – qu’il doit exister des prostituées heureuses, des prostituées qui ont trouvé du pouvoir dans leurs styles de vie, et surtout, facteur déterminant, que les choses vont suffisamment bien pour que l’industrie du sexe puisse prospérer comme si de rien n’était.
Beaucoup de gens entendent peut-être qu’une partie de la classe prostituée vit des conditions horribles – mais on les catégorise comme les victimes de la traite internationale, ou les femmes ayant été violentées avant leur entrée dans l’industrie du sexe ; on les présente comme ce qui doit être la marge pathétique de l’industrie du sexe.
Ce que l’on veut entendre tant et plus, c’est que l’industrie du sexe peut être nettoyée et ordonnée, pour que les hommes que nous connaissons et aimons puissent consommer une prostituée sans que ce soit considéré comme un tort.
C’est ainsi que le silence de la classe prostituée va continuer à grandir, puisqu’on n’accordera jamais à ces femmes des mots pour exprimer les réalités très simples de ce que c’est que d’être prostituée.
Les mots de la violence sexuelle masculine – dont l’usage est autorisé aux personnes non prostituées – sont évacués, et cette violence est redéfinie de façon à ressembler à tout ce qu’elle n’est pas.
Avant de parler des mots qui sont volés à la classe prostituée, je vais parler de comment ce langage nous est volé, et des raisons pour lesquelles nous avons laissé ce vol être occulté.
La plupart des prostituées sont violées trop souvent pour que leur esprit arrive à en garder la trace – mais lorsqu’on est à l’intérieur de l’industrie du sexe, il n’y a pas de langage pour parler du viol, de l’agression sexuelle ou même des préjudices subis. Non, le langage y est irréel et a pour effet d’assassiner lentement et quotidiennement la classe prostituée.
C’est le langage de la transaction commerciale, du libre choix, la langue où l’argent devient symbole de consentement – c’est un langage conçu pour égarer la prostituée et pour s’assurer qu’elle perd de vue ses droits à la sécurité et à la dignité.
Tout langage de la femme prostituée est instillé de force dans son corps et dans son esprit par des profiteurs et des prostitueurs – ses mots sont manipulés jusqu’à ce qu’elle ne sache plus comment parler si on ne lui dicte pas quoi dire.
Mais la société a décidé que les personnes prostituées doivent comprendre leur propre condition et que ce qu’elles disent doit toujours être la vérité.
Nous ne disons pourtant pas cela quand un enfant dit aimer un père qui la viole ; nous ne disons pas cela quand une amie nous dit que son conjoint ne la frappera plus jamais ; et nous ne disons pas qu’il est normal de pardonner aux hommes qui violent et torturent une femme ou une jeune fille hors des frontières de l’industrie du sexe.
Mais à chaque jour et en tout lieu, on trouve des raisons et des excuses aux hommes qui violent, torturent et assassinent les femmes de la classe prostituée.
Voilà pourquoi il n’est pas étonnant qu’à chaque jour et en tout lieu, la classe prostituée se tait, car elle vit confrontée à un niveau inouï de torture sexuelle.
Elles savent en leur for intérieur la nécessité de se taire, car elles savent qu’elles ne seront pas crues et que, même si on les croit, elles verront sans doute leurs témoignages écartés, parce que d’autres questions sont plus importantes à traiter.
Comment les personnes prostituées peuvent-elles savoir qu’elles sont violées, que bon nombre de leurs expériences quotidiennes seraient classées comme étant de la torture ?
Comment peut-on savoir ces vérités toutes simples, quand partout des mots disent qu’il s’agit de ton choix, que ta douleur est ton autonomisation, que ta perte de dignité est juste amusante ?
Être prostituée, c’est apprendre à ne pas ressentir la douleur et ne pas se souvenir de la dignité, c’est un monde qui devient une succession de moments, sans passé ni avenir.
Le langage ne veut rien dire quand on vous réduit à rien."


http://sisyphe.org/spip.php?article4392

Et pour clore mes méfaits, voici un texte qui vient d'être publié dans le mensuel québécois anarchiste Le COUAC (Ah! Tabernacle ! les insupportables "floodeureuses" !) :


STRESS AU STRASS

Coup de pied dévastateur à la filière proxénète en France, un mystérieux Collectif Abolitionniste Francophone (CAF) vient de publier en ligne une «Anatomie d’un lobby-prostitution», très détaillée (1). La Commission Charbonneau québécoise peut en prendre de la graine…
Depuis, sur les listes de discussion, les unes applaudissent et les autres s’indignent de ce déboulonnage d’un poids-lourd du «milieu», le STRASS. Le CAF documente le financement, les accointances et les tactiques du «Syndicat du travail sexuel». Il fouille son entrisme dans l’État français, officiellement abolitionniste. Il y aurait un cheval de Troie dans la
demeure… Serait-ce pourquoi les Socialistes mettraient discrètement au rancart la pénalisation promise des prostitueurs. La sociologue Marie-Victoire Louis, pionnière de ce chantier en France, s’en indigne vertement (2).

Syndicat de boutique?

L’étude du CAF pose le problème de la représentativité de ceux et celles qui s’intitulent «Les Putes», pour accuser de «putophobie» à la télé les féministes critiques de leur «industrie». Représentent-ils et elles les prostituées… ou ceux qui les exploitent: proxénètes, trafiquants, dealers?
La plupart des femmes prostituées en France y sont amenées par des réseaux maffieux d’Europe de l’Est, d’Afrique ou de Chine. Vivant un véritable esclavage, comment pourraient-elles mandater les quelques «strasseux» parisiens de souche qui se disent leurs porte-parole et dont le CAF expose les financeurs et tactiques?
Sur son blog (3), Christine Le Doaré, une militante féministe lesbienne combattue par des hommes du STRASS depuis des années, commente vigoureusement l’étude du CAF avec d’autres informations clé:
«Pourquoi ce lobby se comporte-t-il ainsi et surtout pourquoi s’arroge-t-il le droit de parler au nom des femmes prostituées? Pourquoi doit-il se comporter d’une façon aussi abusive et disproportionnée, face au mouvement abolitionniste? Quels sont les enjeux qu’il entend préserver?»
Au-delà du dilemme théorique entre une prostitution critiquée comme violence inhérente ou qualifiée de métier comme un autre, elle nous ramène, forte de sa longue expérience du milieu, à l’essentiel – les femmes assignées aux
prétendus besoins masculins:
Christine Le Doaré : «En réalité, ce ne sont ni des putes, ni des prostituées, ni même des sex-workers, mais bien des femmes. Des femmes pénétrées passe après passe, jusqu’à la nausée, quand elles ne sont pas agressées, violées, tuées. Ces femmes sont de plus en plus jeunes et de plus en plus nombreuses, elles sont déplacées, entassées sur les lieux de prostitution, qui, comme une gangrène, prolifèrent partout sur la planète.»

Situation délicate

Cette traite des femmes est en fait le tendon d’Achille du lobby pro-prostitution, qui a besoin du feu vert de l’État pour rendre ses bordels mainstream et légaliser l’exploitation sexuelle d’autrui. Mais comme être pénétrée sur demande n’est presque jamais le choix des femmes qui en ont d’autres, les patrons doivent renouveler la classe prostituée (4) au Tiers-Monde et dans les pays catastrophés par la crise.
Ils le font aussi chez nous. Comme le démontre une récente recherche de l’Institut de recherches et d’études féministes, à l’UQAM, une traite domestique drague continuellement les filles dans les centres de détention juvénile, les réserves autochtones, et les régions dévastées par le chômage (5).
Les trafiquants se retrouvent donc en opposition directe à l’État, devant contourner des contrôles d’immigration croissants et permuter adolescentes et jeunes femmes d’un bar de danseuses et d’une province à l’autre pour dérouter la police. Le lobby pro-prostitution cherche à se laver les mains de cette traite, habituellement effectuée sous contrainte, qui dément l’alibi classique d’un «libre choix» individuel des femmes.
Dans son étude, l’IREF souligne également le rôle de la mondialisation, du racisme et d’un capitalisme exacerbé dans cette contrainte à la prostitution. Les auteures, Sandrine Ricci, Lyne Kurtzman et Marie-André Roy, recommandent un soutien concret et immédiat aux femmes victimes ou vulnérables. Elles exigent aussi leur dépénalisation immédiate, et de tenir réellement tête à leurs exploiteurs, contrairement à la «full décrim» dont rêvent les proxénètes et futures madams.

Amour et cocaïne

Elles ont transcrit les récits des femmes amenées à s’endetter par amour pour un pimp séducteur, qui va jusqu’à faire tatouer sa «propriété». Dette dont elles doivent ensuite s’acquitter durant des années, payant très cher la dope essentielle pour tenir le coup.
D’ailleurs, pour le CAF, c’est l’addiction à la coke qui explique l’appui de certains cinéastes et autres pipoles à l’exploitation sexuelle commerciale. Mais on ne cite pas (encore) de noms…
À Montréal, la prostitution forcée fait l’objet d’une récupération «tendance». Un collectif branché, dont le masculiniste Maxime-Olivier Moutier, lançait le 21 mars un livre d’art très coûteux qui exploite sans vergogne les horreurs d’un ex-bordel de la rue Ontario. Ce qui a suscité chez l’ami Bruno Lalonde, de la librairie Le livre voyageur, un beau «coup
de sang» où il lance, sur YouTube: «Je ne supporte plus l’esthétisation de la souffrance des autres» (5).
Il nage à contre-courant mais, heureusement, il n’est pas le seul.

Paulo L’Abolo


_______________________________________________

1. CAF, « Anatomie d’un lobby pro-prostitution: Étude de cas, le STRASS, en France »,
http://bit.ly/16fSC5M . Lire aussi: « La pertinence de la transparence », http://bit.ly/ZnC9NP

2. M.-V. Louis, …Le proxénétisme a encore gagné - http://bit.ly/15oZ6Nl

3. C. Le Doaré, Limpidité d’un mouvement, opacité d’un lobby - http://bit.ly/15oZwmP

4. Concept créé par Rebecca Mott, survivante :
http://<http://sisyphe.org/spip.php?rubrique155>sisyphe.or/spip.php?rubrique155

5. S. Ricci, L. Kurtzman et M.-A. Roy, La traite des femmes à des fins d’exploitation sexuelle : entre le déni et l’invisibilité, http://bit.ly/YFmdiD

6. Bruno Lalonde, Hôtel Jolicoeur, YouTube - http://bit.ly/13ard7D

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