Préjugés, sexisme: combat permanent

Le punk n'est pas qu'une musique ! Ici on discute de l'actualité, des manifs et des résistances en lien direct avec notre culture. "Make punk a threat again", ça vous dit encore quelque chose ?!
Norma Bates

Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par Norma Bates » 26 mai 2016 18:28

abFab a écrit :Après j'avais commencé à écrire une explication... mais je ne tomberais pas dans le mansplaining :lol: :lol:
Ben, je t'interroge sur un aspect du texte qui me questionne, donc, je pense que ça n'a rien de condescendant, ni de "dominant", si tu m'apportes une explication, bien au contraire! :lol: (Et de plus, de mon coté, je m'adresse à toi "de féministe à féministe", pas "de femme à homme" ;) ).
Je vois ce que tu veux dire quand tu parles de manuel "assumé", je n'avais pas vu ça sous cet angle en effet (le fait qu'un homme puisse avoir besoin de ce genre de conseils pour s'impliquer dans la lutte). Mais je ressens tout-de-même un côté impératif sur l'ensemble du texte, un peu dérangeant. Personnellement, je ne tolèrerai pas qu'un groupe d'hommes parle sur ce ton en s'adressant aux femmes, alors j'ai du mal à concevoir qu'un groupe de femmes le fasse envers les hommes (ce qui malheureusement les mets, les hommes, dans un même panier, sans prendre en compte la sensibilité et le rapport au féminisme de chacun.... :hausse: ). Et puis, il y a une contradiction aussi entre le ton général et le 3ème point: "Pensez à vous-même mais faîtes-le avant tout par vous-même. C’est votre job, pas celui des féministes, de vous éduquer vous-même."...

Bref, j'ai du mal avec la conjugaison à l'impératif je crois, le fait que certaines phrases donnent l'impression d'ordonner, plutôt que de suggérer. Par exemple, "Vous pouvez lire des textes féministes", ça me parlerait beaucoup plus que "Lisez des textes féministes". Mais j'imagine bien que les personnes qui ont écrit ce texte ont réfléchi avant d'employer ces tournures, et qu'elles ont conclu, peut-être, que ça pourrait avoir un impact positif car plus "incisif" et plus direct....
abFab a écrit :
On nous exlut, acceptez donc de l'être en retour et de faire avec, sans chercher à comprendre... :?: :roll:
C'est vraiment le point principal, l'article 1 :

"1. Lisez autant que vous pouvez des textes sur les questions féministes et la critique féministe… et continuez. Pas seulement dans les magazines. En réalité, sauf rares exceptions, les articles de magazine sur les féministes et leurs actions sont ultra-simplificateurs, à la recherche du sensationnel ou outrageusement sexistes."

C'est à nous, qui faisons partie du groupe oppresseur de nous renseigner, de nous informer. Si vous passez votre temps à nous expliquer, c'est du temps et de l'énergie perdue. Vous avez développé toute les théories, toutes les concepts, vous avez écrit des dizaines d'articles, de billets.... c'est à nous de comprendre par nous-même, et de vous laisser votre temps de lutte... à l'organisation de la lutte.
Moi je ne dirais pas que c'est de l'énergie perdue, la discussion, ça porte toujours ses fruits, surtout quand des hommes cherchent à discuter, posent des questions, s'intéressent au féminisme.
Mais oui, je comprends tout-à-fait, on a besoin de temps, juste entre femmes. C'est évident. Mais (ben oui, y a ENCORE un mais ;) ), le point que je trouve plus dangereux, c'est, celui qui réduirait les individu-e-s à leur sexe en leur imposant de ne pas chercher à comprendre quand il y a exclusion. On veut combattre un déterminisme de sexe, mais on exclut par le sexe. On essaie de combattre le fait de se comporter en tant qu'homme ou femme selon le schéma social qui nous est imposé depuis l'enfance, mais d'un autre côté, on entretient ça en excluant parfois trop catégoriquement et sans explications...... je pense tout simplement que c'est pas mal de faire attention à ça, en nuançant un peu.
"Vas-y mets ton ego de côté
Juste cinq minutes, hein,
Le temps d'écouter, sincèrement.
Moi, c'est tous les jours qu'on veut me remettre à une certaine place
Et te sens pas vexé
Quand je te dis que tu m'as blessé
Ça paraît évident ? Et ben captes vite ! Maintenant !
Et je vais pas te prendre par la main, pour tout t'expliquer,
Démerde-toi, pour sortir de tout ça,
Élève le niveau, élève toi...
"
Oui, c'est bien vu! C'est vrai que c'est épuisant, usant, de devoir tout expliquer. Et pourtant, il faut encore le faire, même au risque de se faire chier à tout apporter sur un plateau pour que les esprits s'éveillent un brin...... C'est malheureusement, encore nécessaire.....
C'est du Makach et c'est vachement bien... http://makach.toile-libre.org/paroles.html
"Enfante" est terrible! Cimer!

Norma Bates

Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par Norma Bates » 26 mai 2016 18:58

Et puisqu'il faut encore expliquer pourquoi on lutte, un court-métrage pour faire prendre conscience, juste en 3 minutes, de ce qu'on peut vivre au quotidien en tant que femme dans la rue:

http://www.terrafemina.com/article/-au- ... _a311289/1
3 minutes. C'est le temps qu'il faut à "Au bout de la rue" pour nous faire ressentir la peur que ressentent les jeunes femmes quand elles rentrent seules le soir. Un court-métrage nécessaire qui dénonce en un plan séquence et peu de mots le harcèlement de rue.
(je regrette par contre le terme "jeunes" (femmes), car c'est la même à n'importe quel âge, évidemment)
"J'ai voulu être au plus près de mon personnage et je me suis dit que le meilleur moyen de me mettre dans la peau de quelqu'un, c'était de le faire en temps réel. Le son est aussi très important, puisqu'il recrée ce qu'elle, elle perçoit."
En effet, le bruit de la respiration accélérée de la jeune femme est très parlant, glaçant même, surtout quand on a toutes déjà vécu ça. Et le voir, même si c'est fictionnel, ça reste très réaliste, on peut ressentir la sueur froide qui monte, le cerveau qui bouillonne, le cœur qui s'emballe, la boule dans le ventre, l'hésitation à changer de trottoir, l'impression que tous les mecs qu'on croise dans les instants qui suivent vont aussi nous agresser, se mettre à tout calculer, anticiper ce qu'on devra faire si ça va plus loin.... Et puis, rentrer, chez soi ou chez un-e pote au plus vite, fermer la porte, souffler un grand coup, et devoir oublier très vite. :bad-words:


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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par PariA » 27 mai 2016 6:22

extrêmement efficace. Merci.
>> T'es vraiment un nulos Paria ! \o/ \o\ |o| /o/ \o/

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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par abFab » 27 mai 2016 12:18

Norma Bates a écrit :
abFab a écrit :Après j'avais commencé à écrire une explication... mais je ne tomberais pas dans le mansplaining :lol: :lol:
Ben, je t'interroge sur un aspect du texte qui me questionne, donc, je pense que ça n'a rien de condescendant, ni de "dominant", si tu m'apportes une explication, bien au contraire! :lol: (Et de plus, de mon coté, je m'adresse à toi "de féministe à féministe", pas "de femme à homme" ;) ).
Je vais essayer d'apporter quelques éléments, non pas de réflexion, mais d'analyse telles que j'ai pu les lire. Je ne donne pas mon avis, je porte celui qui a déjà été exprimée par des féministes à de nombreuses reprises.
Et comme le lectorat de ce forum est à 90% masculin, je ne déroge pas vraiment au point n8 ;)

Nous les hommes on ne peut pas comprendre, on ne peut pas ressentir l'urgence de la lutte d'émancipation des femmes. C'est un fait.
Moi, homme blanc, quand je vais bosser, c'est : douche, sous-vetements, jean, godasses, sweat, blouson, et trajet. Et pendant tout ce temps je pense à ce que je veux (mon principal souci étant de ne pas avoir de chaussettes dépareillées).

Un femme, c'est :
- maquillage (le maquillage n'est pas un choix dans le monde patriarcal... il est intégré, il peut être un plaisir, une corvée, mais les filles qui décident de ne pas se maquiller sont militantes, conscientes ou non, elles ont déconstruit l'injonction patriarcale et on fait ce choix de manière "éduquée"). Si t'es pas maquillée on te le fera remarquer, si t'es trop maquillée, on te le fera remarquer.
- s'habiller. Si ta jupe est trop courte on te traite de pute, si elle est trop longue on te le fera remarquer.
- Sortir de chez soi. La rue, de manière générale, n'est pas pour les filles. Dès que tu mets les pieds dans la rue, c'est le risque de harcèlement.
- Faire le trajet. 100% des filles ont été victime de harcèlement dans le métro.
- Le boulot. Faire la bise aux collègues. Si un seul collègue est un gros dégueu, ça peut te pourrir tout le trajet rien qu'à l'idée de devoir lui claquer la bise.
- Le collègue harceleur, celui qui fait des vannes pourries... les hommes subissent aussi des conditions de travail stressantes, mais les femmes subissent les mêmes, avec en plus les multiples configurations de harcèlement sexuel (20% des femmes en situation de harcèlement sexuel au boulot).
- la nuit qui tombe. La nuit n'est pas une alliée ! Traverser le parking, traverser telle ou telle rue mal éclairée. Du coup, de nombreuses femmes préfèrent quitter le boulot plus tôt, même si elles ont encore du taf. Contrairement aux collègues masculins, qui restent ainsi entre eux (et renforcent localement l’oppression patriarcale : c'est pas la fille, qui en plus ne fait pas d'heure sup qui profitera des diverses promotions).
- trajet du retour.
- Faire la bouffe (le travail domestique est encore en très grande partie assurée par les femmes. Et ce travail domestique est d'une importance capitale dans la pérennisation du patriarcat : il joue grosso modo le même rôle que la plus-value encaissée par le propriétaire sur le dos du prolétaire dans le cadre de l'exploitation capitaliste).
- donner du sexe (beaucoup de filles préfèrent donner du sexe pour calmer le compagnon plutôt que de subir les réflexions, récriminations etc... "Elle" avait même balancée un truc dégueulasse sur la pipe "ciment du couple", comme quoi il était normal de faire une gâterie à son homme pour fluidifier les relations au sein du couple... sous-entendu, si tu refuses de sucer faudra pas t'étonner si ton mec il se vénère).

J'arrête là. Mais c'est évident que pour nous les mecs, le féminisme c'est un passe-temps, alors que pour vous c'est un job à plein temps. Et que l'urgence de la lutte, on est incapable de la ressentir comme vous.
Donc, il n'y a pas égalité entre les hommes et les femmes sur les questions de féminisme. Ce n'est pas une question de sexe, c'est une question de classe.




Moi je ne dirais pas que c'est de l'énergie perdue, la discussion, ça porte toujours ses fruits, surtout quand des hommes cherchent à discuter, posent des questions, s'intéressent au féminisme.
Je vois bien ton côté optimiste... mais j'ai bien peur que ce soit faux. En tous cas les faits ne plaident pas vraiment en faveur de cette vision optimiste.
Prenons la non-mixité. La non-mixité c'est un concept relativement ancien, il a été importé par Delphy pour le MLF dans les années 70 (elle a importé la pratique en observant les black panthers, elle l'explique dans le documentaire qui lui est consacré)... et en 2016 il est impossible à des groupes de filles de faire des réunions non-mixtes à Nuit debout. Combien d'énergie, de temps de lutte, faudra(it)-il dépenser pour arriver à faire comprendre à ces gentils hommes que la non-mixité est un outil de lutte ? A ce rythme, plusieurs siècles. Et pendant ce temps perdu, la lutte elle-même ne s'organise pas, les femmes perdent leur énergie (qui est limitée par l'oppression systémique quotidienne on l'a vu), et finissent par se décourager de la lutte elle-même. Sans rien faire, juste en étant gentil et en cherchant à s'informer à discuter, encore et encore, l'homme finit par décourager la lutte des femmes. Le patriarcat tranquille, avec la bonne conscience en plus.
Mais la non-mixité, si elle est emblématique, n'est qu'une des multiples facettes. A l'heure actuelle alors que le féminisme et les théories féministes commencent à percer dans le milieu mainstream (il ya eu récemment des polémiques au niveau national sur la construction du genre, l'égalité des genres à l'école, etc), les milieux militants, dont on pourrait supposer qu'ils sont à l'avant-garde, sont toujours aussi sexistes et imperméables à toute avancée. On a pu voir un collectif Humungus dessiner une femme à poil sur une barricade au cours d'une soirée antifa ! Sas que ça ne dérange personne. Et pour cause, toutes les orgas, tous stands, tout est tenu par des mecs. Les meufs au bar et à la cantine.
En ce qui concerne les concerts, ils sont composés de groupes quasi exclusivement masculins. Si ça servait à quelque chose de discuter avec des féministes, les orga auraient compris comment on pousse des groupes de filles à monter sur scène. C'est pas du miracle, c'est de la construction des genres. (cite moi une seule orga qui mette en avant les groupes de filles, sans en faire un évènement particulier du style "girls quelquechose", une orga qui veille à équilibrer les soirées... y'en a pas une seule... quand une soirée se trouve "équilibrée" c'est le fruit du hasard, pas d'une volonté quelconque qui serait l'expression de la compréhension des théories féministes).
Autre exemple symptomatique. Aujourd'hui, en 2016, une orga peut venir à l'antenne d'un radio libre, passer un chanson violemment homophobe.. et continuer à être citée en exemple de groupe de jeunes engagés et militants qui se bougent sur paris. Les questions de genres sont la dernière roue du carrosse en milieu militant.
De nombreuses féministes en sont venues à la conclusion que le féminisme n'était qu'un passe-temps pour pouvoir choper des meufs. Ca peut faire marrer a priori, mais c'est pas du tout nouveau : Dworkin avait analysé le mouvement hippie sous cet angle (voir ici, dans le chapitre 3 sur l'avortement).

Je mets ici un extrait de l'analyse du site "antisexisme" :
La grossesse était un frein à la baise pour ces hommes de gauche. Une femme enceinte pouvait plus facilement la refuser. Par ailleurs une femme avec un enfant, ça réduit aussi la baise : elle doit s’en occuper et ne peut pas être toujours disponible. Donc les hommes de gauche s’investirent dans la lutte pour l’IVG et la contraception.
Entre temps, les femmes de gauche se rendirent compte qu’elles avaient été baisées. Elle quittèrent les mouvements des hommes, la contre-culture et firent un mouvement bien à elles : le mouvement féministe.
C'est à rapprocher de ce que dit Sylvie Tissot ici (c'est à 25min35) :
https://youtu.be/2mZ-CuMLEXY?t=25m34s
Elle parle d'un sexisme "hallucinant" dans les milieux d'extrême-gauche et dit qu'elle a préféré partir pour des milieux non-mixtes.
Elle parle aussi du découragement de celles qui restent.


Et après le découragement, celles qui restent sont de plus en plus véner, et elles commencent à s'exprimer :
https://iaata.info/Allez-tous-vous-pend ... -1217.html
et là
http://salutcamaradesexiste.tumblr.com/


Mais vraiment, n'hésite pas à entrer en contact avec des féministes extérieure à notre milieu. La notion de sororité n'est pas un vain mot. Les féministes sont véners contre le patriarcat et toutes ses composantes mais elles se soutiennent de manière très forte. La sororité c'est la réponse à la solidarité de couilles.
La solidarité de couilles c'est une arme surpuissante qu'il est pratiquement impossible de briser frontalement. La solidarité de couille c'est le soutien impensé entre mecs pour exclure les perturbations féministes. C'est en général inconscient, c'est parfois par malveillance, parfois par lâcheté, mais le plus souvent par opportunisme. Entre un pote qui peut rendre service et une femme isolée, on choisira le camp du mec. C'est indolore pour les mecs, c'est ultra-violent pour les femmes.
C'est, par exemple, comme cela qu'Humungus peut fresquer des femmes nues au milieu d'antifa sans déclencher le moindre début de polémique.
C'est, par exemple, en ne propageant pas une information que l'on va circonscrire un feu : alors que curieusement la reformation des ludwig a mis quelques heures à se propager sur les internets, le fait que certains groupes chantent des chansons homophobes, que des assos les soutiennent et diffusent leur zique, cette info elle ne circule pas (#lahierarchiedelinfo) (de la même manière on pourra suivre quasi en temps réel la circulation de l'information sur la fresque Humungus... pour l'instant c'est zéro, il parait qu'elle a été likée plein de fois sur le fb de chester mais les orga de la soirée ne semblent pas s'en émouvoir).
C'est comme cela que même en milieu militant, une agression ou un viol sera toujours minimisé, que le victim blaming sera toujours un réflexe (coucou nuit debout). Quand l'opportunisme de couille rejoint la culture du viol...

Et malgré des dizaines, des centaines d'heures d'explications, again and again... on en est toujours là.

Dernier point et après je ferme ma goule promis...
Mais oui, je comprends tout-à-fait, on a besoin de temps, juste entre femmes. C'est évident. Mais (ben oui, y a ENCORE un mais ;) ), le point que je trouve plus dangereux, c'est, celui qui réduirait les individu-e-s à leur sexe en leur imposant de ne pas chercher à comprendre quand il y a exclusion.
En leur imposant de chercher à comprendre, justement ! :lol:
Mais à comprendre par eux-même parce que les explications sont à portées de main. Du temps passé à rabâcher des explications c'est du temps perdu. Soit le mec se sent concerné et il ira chercher, il s'éduquera lui-même... soit il ne se sent pas vraiment concerné et il te fera perdre ton temps (et le temps perdu pour la lutte, c'est du temps gagné par le patriarcat).
Si un mec veut savoir comment fonctionne un moteur quatre-temps il va pas aller demander des cours au garagiste du coin, il saura très bien se débrouiller tout seul pour comprendre. Si le garagiste doit filer des cours de mécanique à chaque individu.e qui passe dans l'atelier, ta bagnole est pas sortie du garage !


En gros pour simplifier, si nous les mecs, on veut vraiment voir une émancipation féministe, il faut qu'on arrête de vous faire chier ;)




:pirate:
(a)social
Mastodon : https://mstdn.io/@abFab

"Messieurs, j'ai refait tous les calculs. Ils confirment l'opinion des spécialistes : notre idée est irréalisable. Il ne nous reste qu'une chose à faire : la réaliser." (Latécoère)

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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par abFab » 28 mai 2016 10:06

Pour rebondir (en partie) sur ce que je disais au sujet de la solidarité de couille... une bédée qui parle de la violence des opprimé.e.s, et du gaslighting

=> https://emmaclit.com/2016/05/25/la-viol ... 7e%C2%B7s/

La définition de wikipedia est un peu confuse, dans la bédée il est dit :
"Cette façon d'agresser une personne, et de lui faire croire que c'est elle qui réagit mal, c'est en fait une technique de manipulation très pratique pour empêcher des personnes de se rebeller. Ca a même un nom, le gaslighting.
Il ya deux choses qui facilitent le gaslighting d'une personne ou d'un groupe de personne :
- la solidarité entre les dominants (dans mon cas la solidarité masculine)
- des conditionnements sociaux qui biaisent notre perception de la réalité (dans mon cas, le patriarcat pousse à voir l'agressivité masculine comme une façon légitime de s'affirmer, et l'agressivité féminine comme de l'hystérie)"
(a)social
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"Messieurs, j'ai refait tous les calculs. Ils confirment l'opinion des spécialistes : notre idée est irréalisable. Il ne nous reste qu'une chose à faire : la réaliser." (Latécoère)

Norma Bates

Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par Norma Bates » 30 mai 2016 19:44

Merci d'avoir pris le temps de répondre longuement !
abFab a écrit :Je vais essayer d'apporter quelques éléments, non pas de réflexion, mais d'analyse telles que j'ai pu les lire. Je ne donne pas mon avis, je porte celui qui a déjà été exprimée par des féministes à de nombreuses reprises.
Et comme le lectorat de ce forum est à 90% masculin, je ne déroge pas vraiment au point n8 ;)

Nous les hommes on ne peut pas comprendre, on ne peut pas ressentir l'urgence de la lutte d'émancipation des femmes. C'est un fait. Moi, homme blanc, quand je vais bosser, c'est : douche, sous-vetements, jean, godasses, sweat, blouson, et trajet. Et pendant tout ce temps je pense à ce que je veux (mon principal souci étant de ne pas avoir de chaussettes dépareillées).

Un femme, c'est : ...... [....] (Note: joli effort d'énumération.... et y a tant d'autres trucs relous à se taper! ;) )

J'arrête là. Mais c'est évident que pour nous les mecs, le féminisme c'est un passe-temps, alors que pour vous c'est un job à plein temps.
Et c'est justement ce qui est bien dommage ! Tant que les hommes resteront "à côté de la lutte", et pas "dedans", on n'avancera pas ! C'est en ce sens que je pense qu'il est important de continuer à parler entre femmes et hommes, entre personnes "oppressées" et "personnes susceptibles d'oppresser", d'accepter les questions, les doutes, d'y répondre. Et d'ailleurs le texte d'Elizabeth Pickett le dit: "Parlez à des femmes ou plutôt écoutez les. Ou posez des questions. N’essayez pas de deviner. Soyez curieux en refusant de critiquer, pour votre propre formation et pour votre bénéfice."
Il faut bien des moments d'unité et de mixité pour cela. Lutter en tant que femmes, en ayant réfléchi et discuté ensemble et seules, de ce qu'on subit à longueur de temps, oui, c'est vital et on le fait soit entre copines tout simplement, de façon informelle, ou via des réus/moments choisis, juste entre filles/féministes; mais une fois cela fait, ceux qui doivent entendre notre colère, notre usure, nos attentes, nos espoirs, ce sont aussi (et surtout) les hommes.

Et oui, individuellement, personnellement, je préfère répondre à un garçon qui me dit qu'il ne comprend pas que tel ou tel moment se fasse en non-mixité, plutôt que de l'ignorer et de lui dire "Ecoute, en tant qu'homme, tu nous exclus à longueur de temps, accepte sans poser de questions, qu'on t'exclue aussi" (c'est vraiment un des uniques point (le n°6) qui me dérange dans le texte d'ailleurs, finalement). Mais on se rejoint sur le point principal évidemment: le garçon en question doit accepter ce besoin de temps non-mixte, sans s'y opposer et sans culpabiliser le groupe de femmes qui souhaitent l'organiser. Absolument. Mais les propos de Elizabeth Pickett dans son texte à ce sujet sont, je trouve, contradictoires et le ton employé, trop "donneur d'ordre".....
Et que l'urgence de la lutte, on est incapable de la ressentir comme vous.
Donc, il n'y a pas égalité entre les hommes et les femmes sur les questions de féminisme. Ce n'est pas une question de sexe, c'est une question de classe.
Pour moi l'espoir premier dans la lutte, c'est que les hommes puissent ressentir pleinement cette urgence (et sans être trop naïve non plus, j'ai bon espoir qu'on puisse provoquer l'empathie en expliquant ce qu'on vit.....) et nous rejoignent sincèrement et absolument dans le combat contre le patriarcat. Car on lutte pour être entendues par qui et faire réagir qui, à la finale?
Mais comme tu dis, c'est sûrement là aussi un exemple de mon côté "optimiste".... :calimero: :hausse:
abFab a écrit :
Norma Bates a écrit :Moi je ne dirais pas que c'est de l'énergie perdue, la discussion, ça porte toujours ses fruits, surtout quand des hommes cherchent à discuter, posent des questions, s'intéressent au féminisme.
Je vois bien ton côté optimiste... mais j'ai bien peur que ce soit faux. En tous cas les faits ne plaident pas vraiment en faveur de cette vision optimiste.
Prenons la non-mixité. La non-mixité c'est un concept relativement ancien, il a été importé par Delphy pour le MLF dans les années 70 (elle a importé la pratique en observant les black panthers, elle l'explique dans le documentaire qui lui est consacré)... et en 2016 il est impossible à des groupes de filles de faire des réunions non-mixtes à Nuit debout. Combien d'énergie, de temps de lutte, faudra(it)-il dépenser pour arriver à faire comprendre à ces gentils hommes que la non-mixité est un outil de lutte ? A ce rythme, plusieurs siècles. Et pendant ce temps perdu, la lutte elle-même ne s'organise pas, les femmes perdent leur énergie (qui est limitée par l'oppression systémique quotidienne on l'a vu), et finissent par se décourager de la lutte elle-même. Sans rien faire, juste en étant gentil et en cherchant à s'informer à discuter, encore et encore, l'homme finit par décourager la lutte des femmes. Le patriarcat tranquille, avec la bonne conscience en plus.Mais la non-mixité, si elle est emblématique, n'est qu'une des multiples facettes. A l'heure actuelle alors que le féminisme et les théories féministes commencent à percer dans le milieu mainstream (il ya eu récemment des polémiques au niveau national sur la construction du genre, l'égalité des genres à l'école, etc), les milieux militants, dont on pourrait supposer qu'ils sont à l'avant-garde, sont toujours aussi sexistes et imperméables à toute avancée. On a pu voir un collectif Humungus dessiner une femme à poil sur une barricade au cours d'une soirée antifa ! Sans que ça ne dérange personne. Et pour cause, toutes les orgas, tous stands, tout est tenu par des mecs. Les meufs au bar et à la cantine. En ce qui concerne les concerts, ils sont composés de groupes quasi exclusivement masculins. Si ça servait à quelque chose de discuter avec des féministes, les orga auraient compris comment on pousse des groupes de filles à monter sur scène. C'est pas du miracle, c'est de la construction des genres. (cite moi une seule orga qui mette en avant les groupes de filles, sans en faire un évènement particulier du style "girls quelquechose", une orga qui veille à équilibrer les soirées... y'en a pas une seule... quand une soirée se trouve "équilibrée" c'est le fruit du hasard, pas d'une volonté quelconque qui serait l'expression de la compréhension des théories féministes).
"Si ça servait à quelque chose de discuter avec des féministes, les orga auraient compris comment on pousse des groupes de filles à monter sur scène":
Euh?? là j'avoue que ton analyse me pose clairement question.... C'est parce que les choses ne bougent pas qu'il faut abandonner la discussion? (d'ailleurs, je ne dirais pas que ça ne bouge pas, je trouve qu'en ce moment les filles ouvrent bien bien leur gueule et que ça commence petit-à-petit à pousser les murs, doucement mais sûrement. Mais c'est peut-être un phénomène breton hein, je sais pas :lol: ). Je comprends ce que tu veux dire sur le fait que dans les milieux militants, on a toujours l'impression d'être les deuxièmes roues du carrosse en tant que femmes, mais si on arrête de l'ouvrir et de répondre aux questions et aux affirmations "craignos" de certains mecs, il se passe quoi?? Attendre que ces types se bougent le cul tout seuls et qu'ils aillent lire l'article d'Elizabeth Pickett? je dirais que sur ce point, c'est toi qui est optimiste.
Moi, je n'y crois pas vraiment. Avec quelques copines (dont des copines de Nuit Debout), on parle justement depuis quelques temps des contradictions énormissimes dans les milieux militants/antifa entre ce qui est scandé/chanté/placardé sur les réseaux sociaux/forums etc, et le comportement sexiste aberrant de certains hommes. Et des exemple de discrimination, misogynie décomplexée and co, on en a des pelletés en magasin, les unes comme les autres, dont des choses extrêmement violentes, dont on a essayé de parler à des garçons de certaines orgas, sans que ça ait ému des mecs qui se disent pourtant clairement anti-sexistes, sur le papier. Alors avec ces filles, on s'est dit qu'on allait rédiger un petit papelard, et qu'on allait s'interviewer les unes les autres sur le sujet. Donc, ça, on le fabrique patiemment avec nos petites mains, pendant des temps entre femmes, mais ensuite, le but, c'est de jeter le pavé dans la mare! et que ça éclabousse tant que ça peut, de tous les côtés! On doit expliquer, on doit exposer, on doit raconter aux hommes ce qu'on endure pour que ça rentre! pour que l'empathie crève enfin l'écran et que ça change. C'est ça lutter, ce n'est pas seulement chercher à se faire entendre, mais surtout, à se faire comprendre. Et pour ça, il faut s'imposer ! pour pousser les hommes à s'intéresser à notre cause. On est obligées d'en passer par là.
C'est à rapprocher de ce que dit Sylvie Tissot ici (c'est à 25min35) :
https://youtu.be/2mZ-CuMLEXY?t=25m34s
Elle parle d'un sexisme "hallucinant" dans les milieux d'extrême-gauche et dit qu'elle a préféré partir pour des milieux non-mixtes. Elle parle aussi du découragement de celles qui restent.
Oui, sa réflexion est intéressante et tellement parlante. Je comprends parfaitement l'effet de découragement, de dégoût et l'envie de vivre en non-mixité qu'on peut ressentir parfois.
Mais vraiment, n'hésite pas à entrer en contact avec des féministes extérieure à notre milieu. La notion de sororité n'est pas un vain mot. Les féministes sont véners contre le patriarcat et toutes ses composantes mais elles se soutiennent de manière très forte. La sororité c'est la réponse à la solidarité de couilles.
Comment te dire..... ;)

Dernier point et après je ferme ma goule promis...
Mais oui, je comprends tout-à-fait, on a besoin de temps, juste entre femmes. C'est évident. Mais (ben oui, y a ENCORE un mais ;) ), le point que je trouve plus dangereux, c'est, celui qui réduirait les individu-e-s à leur sexe en leur imposant de ne pas chercher à comprendre quand il y a exclusion.
En leur imposant de chercher à comprendre, justement ! :lol:
Mais à comprendre par eux-même parce que les explications sont à portées de main. Du temps passé à rabâcher des explications c'est du temps perdu. Soit le mec se sent concerné et il ira chercher, il s'éduquera lui-même... soit il ne se sent pas vraiment concerné et il te fera perdre ton temps (et le temps perdu pour la lutte, c'est du temps gagné par le patriarcat).
Je ne le vois pas tout-à-fait comme toi, même si je comprends ton analyse et ce que tu veux dire.
Selon moi (mais j'ai peut-être tort), lutter contre le patriarcat, c'est justement parler à ceux qui ont aussi bien le pouvoir de faire son jeu que de le défaire.
Si un mec veut savoir comment fonctionne un moteur quatre-temps il va pas aller demander des cours au garagiste du coin, il saura très bien se débrouiller tout seul pour comprendre. Si le garagiste doit filer des cours de mécanique à chaque individu.e qui passe dans l'atelier, ta bagnole est pas sortie du garage !
Je pense pouvoir dire qu'on ne peut pas comparer la lutte des Femmes au fonctionnement d'un moteur de bagnole (euh, un moteur quatre-temps, c'est un moteur de bagnole? :lol: ). Et là, tu emploies une comparaison avec un rapport marchand, donc, je dirais que ça ne peut pas coller.
En gros pour simplifier, si nous les mecs, on veut vraiment voir une émancipation féministe, il faut qu'on arrête de vous faire chier ;)
:pirate:
De nous faire chier oui! de chercher à comprendre les difficultés qu'on subit en posant des questions, non!
Et aussi en vous intéressant et vous informant par vous-mêmes via la multitude de textes et voies existants, oui! Là-dessus, on est d'accord.
:pirate: ;)

Norma Bates

Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par Norma Bates » 31 mai 2016 12:47

abFab a écrit :Les questions de genres sont la dernière roue du carrosse en milieu militant.
De nombreuses féministes en sont venues à la conclusion que le féminisme n'était qu'un passe-temps pour pouvoir choper des meufs. Ca peut faire marrer a priori, mais c'est pas du tout nouveau : Dworkin avait analysé le mouvement hippie sous cet angle (voir ici, dans le chapitre 3 sur l'avortement).

Je mets ici un extrait de l'analyse du site "antisexisme" :
La grossesse était un frein à la baise pour ces hommes de gauche. Une femme enceinte pouvait plus facilement la refuser. Par ailleurs une femme avec un enfant, ça réduit aussi la baise : elle doit s’en occuper et ne peut pas être toujours disponible. Donc les hommes de gauche s’investirent dans la lutte pour l’IVG et la contraception.
Entre temps, les femmes de gauche se rendirent compte qu’elles avaient été baisées. Elle quittèrent les mouvements des hommes, la contre-culture et firent un mouvement bien à elles : le mouvement féministe.
C'est à rapprocher de ce que dit Sylvie Tissot ici (c'est à 25min35) :
https://youtu.be/2mZ-CuMLEXY?t=25m34s
Au sujet de l'implication des hommes dans le militantisme féministe (et en parlant de Sylvie Tissot), cet article, sur le site "Les mots sont importants", est très intéressant: Quand il s’agit des femmes, y a-t-il vraiment des hommes de gauche ?. Il y est évoqué, en parlant d'écrits de Léo Thiers-Vidal, l'idée que certains hommes de gauche s'engageraient en effet parfois dans le mouvement féministe, avec aussi dans l'idée (consciente ou inconsciente) de "pécho" des femmes "libérées":
Les relations amoureuses de Léo Thiers-Vidal s’accompagnent d’abord d’un questionnement des normes hétérosexuelles et monogames. Dans le texte « Anarchisme, féminisme et la transformation du personnel », il plaide ainsi pour « l’égalité bisexuelle », et les « relations libres », mais conçues à l’opposé de ce qu’y recherchent certains hommes radicaux : « la baise phallocrate et l’accès libre aux femmes » (p. 65).
Ce passage aussi, fait écho à ce qu'on a dit précédemment à propos du manque de soutien des hommes dans le milieu militant:
Dans plusieurs textes, Léo Thiers-Vidal exprime son dégoût de « ces couillus d’anarchistes durs et autonomes » (p. 62). Il y analyse les stratégies rhétoriques que sont la dénonciation du féminisme et de la non-mixité comme « sexisme inversé », le rejet du « politiquement correct » et le droit à la blague sexiste au nom de la « liberté d’expression », ou encore la focalisation sur leur « souffrance » à eux.
Ça donne bien envie de lire les bouquins qui sont présentés! (oui, un jour lointain, quand on aura le temps.... )

Et pour finir sur le sujet, un petit dessin sarcastique sur les hommes "champions de l'activisme", mais qui n'en sont pas moins sexistes, malheureusement:
Male feminist allies be like
Ma bulle préférée c'est celle-ci: "At the social justice reading circle, I stand in solidarity with my sisters, but when I’m chillin’ with the homies and they say something sexist, I either laugh with them or stay silent."
Comme on le disait, ça illustre clairement ce qui se passe de façon très répandue dans les milieux militants....entre autre quand une fresque sexiste n'émeut personne, comme tu l'évoques, pas plus qu'un zine se paluchant sur des photos de femmes violentées (et distribué par des distros "bien sous tous rapports", remember....) et qu'on ferme bien sa gueule par solidarité de couilles, en effet.... :(

Et pour terminer, sur le dernier point que tu cites, dans ta description (non-exhaustive, je sais!) de la journée d'une femme (hétéro):
- donner du sexe (beaucoup de filles préfèrent donner du sexe pour calmer le compagnon plutôt que de subir les réflexions, récriminations etc... "Elle" avait même balancée un truc dégueulasse sur la pipe "ciment du couple", comme quoi il était normal de faire une gâterie à son homme pour fluidifier les relations au sein du couple... sous-entendu, si tu refuses de sucer faudra pas t'étonner si ton mec il se vénère).
Je comprends bien que tu as simplifié pour l'exemple (et je salue à ce propos ton effort de visualiser le quotidien d'une femme), mais je me permets d'ajouter que le sujet me paraît tou-de-même plus complexe et je pense qu'on ne peut pas généraliser à ce point ce que vivent les femmes dans un couple hétéro. J'ai bon espoir (merde, encore mon côté optimiste!) que les femmes féministes aujourd'hui (puisque tu parles des féministes), aient des convictions claires là-dessus et qu'elles parviennent bien mieux à exprimer ce qu'elles veulent ou ne veulent pas, à tel ou tel moment, même si, ce n'est pas forcément facile d'arriver à cela, tu as raison, vu l'héritage qu'on traîne de nos aïeules, qui se soumettaient, la mort dans l'âme, au vomitif devoir conjugal ( :mur: ).

Aujourd'hui, les choses ont, je crois, tout-de-même évolué (même s'il y a encore du boulot, il est vrai), et plutôt que de se "soumettre à la seule envie de l'homme chaque soir" (c'est un peu cliché ça ;) ), ce qui peut au contraire être difficile pour certaines femmes féministes, c'est justement d'assumer leur sexualité, leurs désirs, leurs fantasmes, leurs envies et de les exprimer au sein d'un couple hétéro. Car il arrive pour certaines de ressentir un décalage, entre ce pour quoi elles militent au quotidien (être un sujet libre et affranchi de la domination masculine), et leur sexualité de femme hétéro, notamment sur la question de la séduction. Sonia Feertchak en parle dans son bouquin "Les femmes s'emmerdent au lit- Le désir à l'épreuve du féminisme et de la pornographie" (et ce n'est pas une féministe du milieu extrême-gauche): elle y parle du concept de "féminette", qui représenterait la dualité d'une femme, tiraillée entre ses valeurs féministes et son côté midinette (notamment lorsqu'elle a envie de séduire sexuellement un homme, au risque de s'objectiser).
Il y a un article là-dessus qui m'avait bien plu, mais il se trouve sur un blog psycho de "Elle" ( :oops: ), donc, je ne le colle pas en lien ; le titre de l'article c'était "la sexualité des féminettes").

Concernant l'injonction à la pipe, je me souviens de cet article de "Elle" en effet, et il y en a bien d'autres, à foison même, notamment sur les sites de psychologie de couple à deux balles, qui conseillent gentiment d'"offrir ça à son homme après sa dure journée de travail", parce que hein le pauvre, il bosse plus dur que nous et on se doit de le rendre amoureux chaque jour, alors il l'a bien mérité, même quand on n'a pas envie, il faut parfois savoir se forcer un peu (je me souviens même d'un blog de merde où j'avais lu: "gardez à l'esprit, mesdemoiselles, que l'appétit vient en mangeant"... :mur: ). On est d'accord que c'est bien craignos quand une femme en est à ce degré de non réflexion. Mais ça ne se passe pas majoritairement comme ça dans les couples hétéro, encore moins quand les personnes sont ouvertes sur le sujet du féminisme (et heureusement bordel!) et le sexe peut être vécu de manière tout-à-fait épanouie au cours de la journée-type d'une femme hétéro en couple, sans soumission ni injonction sous-entendues, mais au contraire, avec des envies assumées, exprimées et entendues par chacun-e (c'est beau :lol: ).

Et pour finir sur le sujet (passionnant de la pipe), il est important de souligner que la fellation n'est pas (forcément) un acte de soumission d'une femme pour un homme (même si certaines femmes le ressentent ainsi après trop d'expériences douloureusement vécues :( ), car c'est la façon dont une femme se perçoit elle-même dans ce moment, qui doit faire toute la différence. Allez, je citerais pour l'exemple, Simone de Beauvoir, dans ses "Mémoires d'une jeune fille rangée": "À travers l’image d’un homme-marchepied, j’opérais la métamorphose du corps en objet. Je la réalisais moi-même quand je m’écroulais aux genoux d’un souverain maître. Pour m’absoudre, il posait sur ma nuque sa main de justicier : implorant son pardon, j’obtenais la volupté. Mais lorsque je m’abandonnais à ces exquises déchéances, je n’oubliais jamais qu’il s’agissait d’un jeu. Pour de vrai, je ne me soumettais à personne : j’étais, et je demeurais toujours mon propre maître." :headbang:

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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par abFab » 31 mai 2016 13:33

Norma Bates a écrit : Et c'est justement ce qui est bien dommage ! Tant que les hommes resteront "à côté de la lutte", et pas "dedans", on n'avancera pas !
Je n'ai rien à redire.
Valérie a fait un texte là dessus :
http://www.crepegeorgette.com/2014/03/1 ... es-hommes/


Norma Bates a écrit :C'est parce que les choses ne bougent pas qu'il faut abandonner la discussion? (d'ailleurs, je ne dirais pas que ça ne bouge pas, je trouve qu'en ce moment les filles ouvrent bien bien leur gueule et que ça commence petit-à-petit à pousser les murs, doucement mais sûrement. Mais c'est peut-être un phénomène breton hein, je sais pas :lol: ).
Je ne dis pas cela, parce que je ne porte pas de jugement sur la façon dont vous menez la lutte.
Je dis juste que nous les hommes, on doit admettre que si vous ne voulez pas discuter, alors c'est votre droit, votre choix, et c'est parfaitement légitime.
Je justifie cette attitude de refus de la discussion, mais je me garde bien de dire si c'est la bonne ou pas. C'est un choix de lutte, votre lutte, et nous devons le respecter. Même si, sur le moment, ça nous énerve, même si on ne comprend pas, même si ça nous parait inefficace : c'est votre choix, on doit le respecter.


De nous faire chier oui! de chercher à comprendre les difficultés qu'on subit en posant des questions, non!
La limite est souvent mince :lol:
Ce qui est important pour les hommes, c'est de comprendre qu'on doit vous laisser le choix dans votre approche. Si on se fait rembarrer, c'est pas grave. Se faire rembarrer, ça doit se transformer en piste de réflexion.

Accepter de se faire rembarrer c'est le premier pas vers la reconnaissance de l'existence de l'oppression systémique. Je fais partie du groupe oppresseur, donc à un moment je vais me faire botter le cul. Si j'exige du groupe opprimé qu'il soit attentif à mes demandes d'information, qu'il réponde à mes interrogations, qu'il soit disponible pour m'écouter et discuter avec moi, alors je ne reconnais pas vraiment l'existence de cette oppression systémique.

Je n'ai pas à discuter de la pertinence de vos choix de lutte.
Je n'ai pas a exiger que tu répondes à mes demandes d'information. Si tu le fais, c'est ton choix de lutte. Si tu ne le fais, c'est ton choix de lutte.
L'un comme l'autre, je dois le respecter.



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"Messieurs, j'ai refait tous les calculs. Ils confirment l'opinion des spécialistes : notre idée est irréalisable. Il ne nous reste qu'une chose à faire : la réaliser." (Latécoère)

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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par abFab » 18 juin 2016 11:12

http://ici.radio-canada.ca/regions/onta ... ario.shtml

Le ministre ontarien des Affaires municipales va démissionner pour permettre à une autre femme d'accéder au cabinet.

Ted McMeekin veut aider la première ministre Kathleen Wynne à atteindre la parité hommes-femmes au sein de son conseil des ministre.

"Parfois, la meilleure façon de promouvoir l'égalité des femmes, c'est de leur faire une place à la table. "

On attend avec impatience que dans not'milieu punk antisexiste les groupes composés de uniquement de mecs refusent de jouer et demandent à l'orga de les remplacer par des groupes avec des meufs pour ré-équilibrer ces affiches 100% masculines ;)


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Re: Préjugés, sexisme: combat permanent

Message par Norma Bates » 18 juin 2016 17:10

abFab a écrit :On attend avec impatience que des groupes punks refusent de jouer et demandent à l'orga de les remplacer par des groupes de meufs pour ré-équilibrer ces affiches 100% masculines ;)
:pirate:
Ah, parce qu'il y a d'un côté des groupes punks, et de l'autre, des groupes de meufs! tiens donc! :punk2: :lol:
Ah, tu l'as pas venue venir celle-là! :bad-words: ;)

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