Punk is not dead - Lexique franco-punk, Luc Robene et Solveig Serre
Tout d'abord, j'ai un aveu à faire : j'ai une tendresse particulière pour Solveig - autrice du livre-. Non pas que je la connaisse particulièrement mais, son prénom me fait remonter à ma tendre enfance quand j'écoutais à plat ventre l'histoire de Peer Gynt raconté aux enfants devant le tourne disque familial. Solveig l'héroïque, amoureuse du bad boy en l'occurrence Peer Gynt, ce "dirty punk", qui le sauve de la grande cuillère des inutiles avec sa chanson éponyme magnifique. Du coup mon jugement sera biaisé. On sera prévenu.
Donc un lexique franco-punk très bien. 178 entrées, dont un quart sont des noms de groupes (-moi aussi je fais des stats-), quelques noms de villes (punk ? - Bordeaux, Caen, Mont de Marsan, Monpellier, Poitiers, Rouen... ça pose le décor...), des noms de lieux (ya pas Paris mais les Halles, Gibus, Golf Drouot, Miroiterie...), quelques accessoires (épingle à nourrice, cheveux, fringues...), des gens (Gilles Bertin, les frères Eudeline, Zermati, Despentes, Plastic Bertrand...people people) et des thèmes (anarchisme, labels, fanzine, prix libre...)...
J'avoue que je n'étais super motivé pour lire ce lexique, si ce n'était deux entrées qui ont retenu mon attention : Brassen's not dead et Fuck Feria (yes Mumu !). Encore une fois je marche à l'affect et les ami-es. Plongée dans le lexique.
Tout d'abord, on voit très clairement des ambiances différentes qui se dégagent de ce lexique et de fait il s'agit des personnes qui ont contribué au lexique.
Il y a le punk 1er vague héroïque, dont les auteurs se gargarisent sur le glorieux passé (Alain Pacadis et autres Marie et les garcons). Je veux pas critiquer mais le nombre de groupes punks qui ont fait une vingtaines de concerts, yen a pléthores. Pourquoi faut-il s'arrêter sans arrêt devant les mêmes clichés du début. Faudrait se poser la question, est ce que ces groupes d'origine ont une filiation (non.), est ce qu'ils ont une originalité indéniable et en rupture (pas vraiment). Est ce que Edith Nylon a vraiment sa place dans le lexique ? Je ne connais personne qui se revendique d'Edith Nylon, voire des Stinky Toys, ou même qui écoute cette musique en allant en concert (à part Philippe Manoeuvre dans son salon). J'ai l'impression qu'on cherche à faire revivre un âge d'or en réécrivant continuellement les même antiennes (genre les compils punks de soul jazz records). Pour moi ça relève de la mise en place d'un mythe figé. Or je m'attends à ce qu'un lexique franco-punk ça soit actuel, de "circonstance" un truc qui évolue avec son temps.
Continuons, il y a toute une partie rock alternatif des années 80 (incontournable bérus et autres lv88) et enfin la scène actuelle très peu représentée (5%). Elle transparait à travers les villes qui on le bon goût de chroniquer l'évolution du leur scène sur les 40 ans d'existence (le punk c’est 76-79, les années 80 et après quelques trucs genre anodins ?). Mais on peut se poser la question du choix des villes : celle du passé héroïque qui sera réutilisé dans le prospectus de la municipalité pour montrer l'intérêt touristique de la ville ? celle des contributeurs/contributrices ? (luc, historien, est bordelais, donc Bordeaux est à l'honneur, cécile, ethnologue, habite du côté de Montpellier, audrey, sociologue, (autrice d'une monographie sur -une salle de concert dite « punk »-) doit etre vosgienne, etc...). Ce qui est dommage, c'est que finalement ce lexique en devient hétéroclite avec pleins de manques. Là où on aurait pu montrer un panorama ville par ville super intéressant et exhaustif, on revient à des bribes de mythes sur quelques scènes locales. Lyon apparait à travers les nuits de Fourvière en 78. "Capitale du punk" laisse sous-entendre le rédacteur, c'est bien éphémère si on en croit le lexique ! Marseille ? Toulouse ? Lille ? Serait-ce que ses villes n'ont pas su générer leur universitaire adéquat ?
Autre point problématique, les articles de flavien, historien, (et qui n'a pas écrit lui-même son panégyrique pour l'article -Paris Violence-, étrange). Il doit avoir sur sa table de chevet Mythes et mythologie de Girardet, un historien -comme lui- « patriotique » et traditionaliste -comme lui- mort -comme... euh... -(le-dit bouquin explique ce qu'est l'Age d'Or). Son article sur La Souris Deglinguée ne fait aucunement référence au concert à la mairie FN "
https://lahorde.samizdat.net/la-souris- ... eme-droite" -> un "monument vivant" dit flav ? vraiment ? Quant à son article sur les labels, je suis étonné qu'il ne mentionne même pas son label Islika production. Parce que tout un tas de labels punks passent à la trappe au profit des labels "mythiques" qui ont eu pignon sur rue (Bondage et autres Dialektik). Et mon cul c'est du tofu ? Trauma social ? Mass prod ? Keupon voyageur ? Attila tralala ? - quand tu regardes les disques punks qui sortent aujourd'hui, c'est une longue liste de petits labels sympathiques qui n'existent visiblement pas pour le lexique... Bon, je ne comprends même pas comment il n'y a pas débat au sein de l'équipe PIND sur la présence de flav (genre son itw dans le lys noir, tu sais le truc d'extrême droite royaliste : comme raconte le webzine "Quand on a des musiques de merde et des textes infiniment moins élaborés que ceux de Paris Violence, on fait du «rock identitaire français» !" Ah... Et c'est pas moi qui le dit mais des connaisseurs de RIF-RAC...). De base ca déconsidère quand même pas mal le projet : il suffit d'être universitaire et tout est oublié ? francois, contributeur et historien, plus connu comme ACI des bérus, n'y voit pas d'inconvénient ?
Passons, pour la bonne bouche je retiendrai surtout les articles de solveig, musicologue. Par exemple, son article sur l'"intelligence punk" est... intelligent ! ca fait plaisir à lire (sérieux, vraiment).
Il y a aussi un article de solveig particulièrement rigolo sur les "nouveaux punks", je cite : "Après les beaufs [...] les nouveaux beaufs [...] Le punk a-t-il su éviter le piège ? [..] Le nouveau punk a défini une éthique de la punkitude et produit bien malgré lui ce qu'il convient d'appeler une "police de la pensée punk" [...] Tu ne laisseras point ceux qui enquêtent sur le punk et qui travaillent à sauvegarder sa mémoire s'engager sur des projets trop poussés car [...] Bref tu seras punk à ta manière, sectaire et chiant."
J'adore. vraiment. Ce sens de l'humour punk - public de merde -. Ceci dit est ce que la critique est nécessairement sectaire et chiante ? Je dirais plutôt envolée, dynamique et constructive, -Lester Bangs, ca me fait bien rigoler-. PIND ? perso je préfère le Punk Is Dead de l'autodérision et la difficulté de définir ce vocable "Punk" (qui n'apparait pas tel quel dans le lexique, "punk" est trop difficile à définir ou c'est un oubli ?).
Dernière chose, les universitaires contributeurs/trics sont cités nommément nom prénom, il manque leur spécialité universitaire, heureusement "internet est ton ami" comble cet oubli. Franchement le bon vieux temps de Johnny Rotten, Clode Panik et Franxoa c'est fini ? Les bons mots, Serre les boulons, Romonte ton ben, qui apporte le jeu, la joie, le fun, la liberté. Les universitaires du punk sont-ils punks ou juste... chiants ? (enfin... sauf solveig !). Il est toujours temps de mélanger le fond et la forme pour la suite des aventures.
Au final, quelques articles très intéressants, des article « Age d’Or » sans intérêt, une exhaustivité absente, un côté people relou. Un ouvrage un peu anecdotique, dommage…
A noter le futur bouquin PIND : ON STAGE/BACKSTAGE
Le but de notre ouvrage est double. Il propose, « on stage », une synthèse des principaux résultats scientifiques du projet de recherche PIND (Punk is not dead : une histoire de la scène punk en France, 1976-2016), que nous avons engagé depuis 2013. Il décrit et analyse « backstage » les dessous de la recherche, ce qu’on évite généralement de montrer, la petite cuisine du chercheur. Notre livre s’adresse donc à tous ceux que le punk intéresse et qui veulent comprendre « ce que chercher veut dire ».
1976-2016, c’est alléchant, le résultat sera-t-il à la hauteur ?