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handicap et confinement

Posté : 01 mai 2020 15:49
par Nhuman punk
yo mon frangin a écrit un chouette texte qui remet les pendules à l'heure:

"Un confinement permanent.
Le confinement n'a rien d'une nouveauté pour celles et ceux que la société a mis 'en situation de handicap', estime le militant anti-validiste Armel Gueguen dans cette réflexion sur les conséquences de l'épidémie de coronavirus.

En effet depuis toujours nous vivons confinés dans des logements ou institutions ghettos, afin de n'être point mélangés à la société car celle ci a peur d'être comme nous. Alors elle nous cache et se complaît dans sa position de domination. Et oui le confinement, le manque de relation sociale, l'enfermement, les privations (notamment de liberté), tout cela est notre quotidien et notre peine depuis longtemps, pour n'avoir commis le crime que de la différence (comme beaucoup d'autres). Le confinement, l'isolation, la solitude et ses répercussions, nous connaissons aussi : les troubles et maladies psychiques, troubles de la personnalité ou alimentaires, la surmortalité, les addictions de toutes sortes, le suicide, etc., qui malheureusement aujourd'hui touchent une beaucoup plus grande partie de notre société. Tout ceci ne sont que les conséquences de notre mise à l'écart, et du déni permanent quant à nos droits. J'ai coutume de dire que nous ne survivons pas dans une société de droit, mais dans une société de faire valoir. Il faut en permanence se battre pour faire valoir les droits à l'éducation, à la santé, au travail, à la culture, à l'hygiène, etc.

Intéressons-nous aux conséquences liées à la situation actuelle de confinement. Parmi elles, on peut citer l'arrêt de nombreuses prises en charge ; en effet depuis le début du confinement, pour beaucoup d'entre nous il n'y a plus de kinésithérapie, de suivi psychologique, de consultation douleur, et une baisse ou un arrêt des aides à domicile. Tout ceci fait que nos corps se dégradent, se raidissent, que nos symptômes s'aggravent et que quand l'on pourra à nouveau être soigné au mieux, il y aura beaucoup plus de travail. Mais le plus grave, c'est que nos handicaps et nos corps, et donc nos possibilités d'interactions avec le monde seront par la situation actuelle davantage diminuées, aggravées et dangereuses. Pour les patients qui ont été en soins intensifs, intubés, sous respirateurs, il va falloir effectuer de la rééducation respiratoire et fonctionnelle, et il ne faut pas les faire attendre ! La conséquence sera sans doute de décaler dans le temps toutes les autres prises en charge et séjours des autres patients suivis pour d'autres pathologies dans les services ou centres de rééducation.

Il faudra donc être extrêmement vigilant à faire au mieux et à ne laisser personne sur le côté, car sans kiné et autres soins quotidiens ou hebdomadaires, si en plus les séjours ou soins en centres de rééducation sont trop retardés, on court à la catastrophe, car ces prises en charge sont vitales pour nos santés physique et psychologique !

Nos proches aussi souffrent de cela, la charge mentale et physique s'accentue, car la baisse des soins et des différentes aides apportées fait que beaucoup d'aidants sont sur-sollicités (si, si c'est possible). Le secteur du "social" est aussi fortement impacté, plus de rendez vous à domicile pour les assistants sociaux et chômage partiel ou confinement, donc moins de suivi, ou plus difficile. Beaucoup de proches, aidants, familles ou personnes mises en situation de handicap se retrouvent perdus, largués devant les différentes situations qui s'aggravent. Les services administratifs sont au ralenti, de même que les Maisons Départementales des Personnes Handicapées, les services sociaux, centres départementaux ou communaux d'action sociale; donc beaucoup de demandes sont au point mort et laissent les usagers dans une situation de stress et de fatalisme, dont il est, et sera difficile voire impossible pour certains de sortir.

Espérons que tout un chacun sera vigilant quant à la suite, un grand merci à toutes ceux et celles qui prennent soin des autres (souvent dans des conditions difficiles et encore plus aujourd'hui). Ils et elles sont essentiels à notre société. Pour tous ceux qui comme moi souffraient déjà de confinement sociétal et de ses conséquences avant le "confinement" officiel, tenez bon : "crochez dedans" comme on dit chez moi !


Armel Gueguen, animateur du collectif anti-capacitiste du Pays de Morlaix (Finistère), mai 2020."

https://www.yanous.com/news/editorial/edito200501.html

Re: handicap et confinement

Posté : 02 mai 2020 22:41
par Norma Bates
Merci pour le partage. Le texte est super bien tourné et c’est vital de dire tout ça. Pour en avoir parlé aussi avec des potes en situation de handicaps et avec des potes aides médico-psychologiques: Les enfants, les jeunes et les adultes vivant en institutions médico-sociales (ou à domicile avec l’appui d’accompagnants), auront été effectivement encore plus oublié-e-s durant cette période. Elles/eux qui sont déjà tout bonnement "zappé-e-s" d’une majeure partie de la vie de la société (qui a décidément bien mauvaise haleine), en temps dit « ordinaire ».
Avec les règles liées au confinement, habitant-e-s de lieux de vie et accompagnant-e-s ont été pris de plein fouet dans des problématiques qui ont bouleversé un équilibre quotidien parfois durement acquis. Ce fut et ça sera, extrêmement rude, pour des personnes heureusement solidaires, qui forment souvent une famille.

Pour rebondir, j’ajouterai que je me suis sentie perplexe, voir dubitative (pour ne pas dire parfois dégoûtée) quant aux élans du cœur étalés ci ou là envers les personnes vivant en maison de retraite. Je ne sais pas trop comment l’exprimer correctement, mais en gros : Il a fallu une crise sanitaire très médiatisée et immensément commentée, pour réveiller à fond les bonnes consciences. On a collé de petits cœurs et des « on pense à vous » plein les vitres des Ehpad. On a tourné moult videos montrant des tableaux veleda à messages chialants…
Pour connaître la vie en Ehpad, et particulièrement en unité de vie Alzheimer : il est rare d’y voir des gens de moins de 60/70 ans venir "rendre visite" à leurs proches…. (c 'est à dire autres que le seul descendant semblant avoir été élu-e pour ça). Et nombre de personnes ne reçoivent tout bonnement jamais de visites. Sur plusieurs années : je peux compter sur les doigts d’une main les fois où des petits-enfants ou arrière petits-enfants sont venus voir des résidants. Il n’y a pas de « coups de fils » reçus ou rarement, et encore moins de mails…
Pour ma part, et pour pas mal de collègues, ce qu’on a pu voir illustré récemment dans de bien jolis articles, a plutôt l'allure d’une supercherie déculpabilisante.

Alors la seule chose que j’espère, mais c’est sans doute naïf, c’est que ça ait peut-être enclenché quelque-chose de durable chez les membres de quelques familles (contrairement aux inconnu-e-s qui se sont découvert-e-s subitement visiteurs bénévoles, et pour qui on sait que ce sera éphémère).

Re: handicap et confinement

Posté : 04 mai 2020 9:46
par Nhuman punk
merci pour le retour je dirais à mon reuf de venir le voir ici! Ouais c'est juste une question trop souvent mise de côté et même dans nos milieux... Je pense que si j'étais pas impliqué par ma famille je serais pas plus sensibilisé que ça en vrai... D'ailleurs jeudi la prochaine et peut être dans la dernière émission solitary confinement, y'aura une interview de mon père que j'ai monté avec un pote, ça causera confinement, lutte contre le validisme en bretagne et amérique latine... à 17h30 jeudi sur radio des confins!
Et mon reuf est en train de réécrire en livre ou brochure on verra, sa conférence gesticulée sur le validisme et sa vie en gros, à voir quand ça sortira!